Le parcours éducatif de Louis III de Bourbon-Condé, 1680-1688
Pascale Mormiche
Comment citer cette publication :
Pascale Mormiche, Le parcours éducatif de Louis III de Bourbon-Condé, 1680-1688, Paris, Cour de France.fr, 2015 (https://cour-de-france.fr/article3843.html). Article inédit en France publié sur Cour de France.fr le 1er septembre 2015.
Le prince français Louis de Bourbon (1668-1710) est un personnage intéressant à plusieurs titres. Comme tous les princes, en raison de son statut social, il vit sous le regard des domestiques, de la cour, des mémorialistes… Il est connu et observé comme personnalité publique dès son enfance, ce qui le différencie des enfants en général. Son éducation est rendue visible par des sources particulièrement continues conservée à Chantilly, si importantes pour les historiens qui souhaitent suivre le déroulement quotidien d’une éducation princière, alors même que ce prince n’a pas joué de rôle important dans sa vie d’adulte.
Mais c’est surtout un prince de sang, un aîné auquel il convient de donner une éducation : son parcours éducatif est intéressant car il s’agit d’adapter l’individu à la destinée imposée par la famille princière des Bourbon-Condé qui effectue elle-même une transition dans sa position à la cour de France. Cette formation double du prince Louis de Bourbon, par l’apprentissage des savoirs et l’apprentissage de son rôle de prince, se déroule en outre après une éducation dans un collège de Jésuites. Quelles intentions éducatives poursuivent ceux qui sont chargés de le former ? Quels trajet, orientation et réorientation suivra-t-il finalement ? Comment s’articulent toutes ces inflexions sur la dizaine d’années que constitue cette éducation ?
Le trajet éducatif et les sources
Louis III de Bourbon-Condé a suivi l’éducation spécifique des princes de Condé qui confiaient leurs fils au collège de Jésuites depuis le début du XVIIe siècle. Dès l’âge de cinq ans, il reçut une éducation collective au collège Louis Le Grand à Paris parmi les membres de la noblesse selon la ratio studiorum jésuite alors estimée excellente.
En 1684, soit après une dizaine d’années passées au collège, les Humanités achevées, l’éducation du jeune Condé est sur le point de se conclure dans la seizième année du prince. Cependant le grand-père, le chef de famille, le grand Condé, plus que le père du prince, Henri-Jules de Bourbon Condé, prend la décision de faire poursuite des études au jeune homme par une éducation domestique préceptorale. Elle se déroulera à Paris dans l’hôtel familial, rue Monsieur le Prince, face au Palais du Luxembourg pendant deux ans avant de se poursuivre après 1686, à Versailles à l’exception de quelques courts séjours à Chantilly, Fontainebleau ou Chambord selon les occupations curiales.
Pourquoi le parcours éducatif du prince se modifie-t-il alors? Les causes ne sont pas évoquées, soit que les savoirs des Jésuites aient été mal acquis par l’élève difficile de caractère, soit qu’ils semblent désormais inadaptés à la culture princière. Il faut considérer la position des Condé à la cour et son évolution. « Princes et rebelles » pendant la Fronde [1], ils ont compris que le pouvoir politique leur échappait et qu’ils s’excluaient de la cour. Ils ont développé une activité de mécénat avec des artistes et des savants dans l’Académie Bourdelot en tentant d’animer une cour parallèle à celle du roi. Puis à partir de 1672, le grand Condé retrouve progressivement la faveur du roi alors qu’émergent la branche des Orléans et celle des Conti, la branche cadette qui a des princes plus âgés.
Le grand Condé constate alors l’importante éducation du grand dauphin, celle de ses cousins Conti et des princes légitimés, éducations princières qui se sont renouvelées dans la décennie 1670, en se détachant progressivement de l’éducation aristocratique. Elles sont données en exemple dans l’Europe entière. Les fils Condé sont encore éduqués dans les Collèges jésuites, certes non plus à Bourges mais à Paris dans un rapport de proximité avec les fils de nobles et de grands bourgeois. Le grand père prend conscience que l’éducation de l’héritier de la famille Condé n’est plus adaptée à la nouvelle culture politique et qu’il faut envisager de faire de son petit-fils, un prince savant à l’égal de ses cousins.
Tout l’espoir de la famille réside sur les épaules de Louis III, seul garçon survivant de Henri Jules de Bourbon Condé, le père qui s’affirme comme un homme de cour. Il envisage de former l’héritier à être un courtisan assidu qui a rang de prince dans une pratique curiale modifiée. Le trajet éducatif va allier ces deux objectifs, le renforcement de certains savoirs associés à l’apprentissage du comportement princier et curial. Le jeune prince de Bourbon-Condé est le premier de la famille à quitter l’éducation de type aristocratique en Collège pour une éducation préceptorale digne du nouveau rôle de prince, en même temps qu’il a été le dernier des princes français à le faire.
Pendant cette période (1683-1689), on dispose de plus de quatre cents billets ou lettres, sources quotidiennes de première main qui montrent des pratiques effectives, prises dans la complexité des relations sociales, du jeu du pouvoir et de l’environnement culturel princier et curial. Depuis son collège à Paris, Louis de Bourbon adresse quelques courriers d’édification morale à ses parents, M. et Mme la duchesse de Bourbon [2] (âgés d’une quarantaine d’années) qui résident dans leur hôtel à Paris ou à Versailles ainsi qu’à son grand-père, le prince de Condé [3] qui vit à Chantilly.
Nous bénéficions surtout des lettres que les précepteurs, Jean de La Bruyère, Joseph Sauveur et les deux jésuites à son service, Alleaume et Du Rosel, adressent quotidiennement au prince de Condé. De plus, le jeune homme est également surveillé par le personnel domestique du grand Condé, Joseph de Rothelin de Xaintrailles [4] (-1713), son premier gentilhomme de la chambre et maître des chasses mais aussi Charles Armand de La Noue du Vair (vers 1648-1716), capitaine des gardes du prince qui renseignent le grand père sur le comportement et la santé du jeune duc, laissant peu de place au propre gouverneur du prince, Jean-Augustin Deschamps [5]. Ainsi le prince de Condé reçoit plusieurs billets par jour et en moyenne cinq lettres par semaine. On ne connaît pas ses réponses, ni les lettres des parents.
Ces témoignages intimes, internes à la famille, individuels, simultanés sont à comparer avec les témoignages publics, les lettres, les Gazettes et les mémorialistes qui se font l’écho du prince en représentation à la cour. Il y a un déséquilibre important entre les sources intimes abondantes qui le décrivent comme un enfant et les rares sources indirectes qui, ayant déjà deux représentants de cette famille à observer à la cour, s’intéressent tardivement à ce jeune prince.
Le contexte familial est socialement et idéologiquement favorable à la formation du jeune prince: tous les efforts vont a priori dans le même sens et semblent être cohérents. Contrairement à beaucoup d’autres enfants, il n’a pas à lutter pour assurer son identité sociale ni définir son trajet éducatif. Malgré ce but commun, apparaissent des divergences entre les projets personnels du prince et ceux du duc, divergences qui s’accroissent au fur et à mesure de la période. Divergences également entre les éducateurs qui ont des objectifs personnels différents et font preuve de plus ou moins de sincérité dans leurs écrits. Pour certains, il s’agit de rester en cour, pour d’autres la relation de clientélisme permet une franchise sans contrainte, tandis que les jésuites défendent leur façon d’enseigner, la réputation du collège face au précepteur qui cherche honnêtement à être utile sans ambition particulière.
Ces divergences transmettent des objectifs discordants à l’enfant. Se dégagent ainsi plusieurs degrés de représentation de ce prince dont on comprend mieux pourquoi son image apparaît contradictoire.
Parfaire le comportement du prince
La nouvelle condition du prince à la cour impose des comportements nouveaux. Dans les premières lettres, le duc de Bourbon est âgé d’à peine quinze ans (1683). De petite taille, il paraît immature. Ceux qui l’éduquent témoignent quotidiennement de son agitation, de jeux de mains, voire de «grimaces [6]». Il court en entrant dans les pièces, il est si agité qu’on craint qu’il ne se blesse, il ne se tient pas droit si bien que sa taille pourrait en pâtir. C’est le gouverneur Deschamps, soutenu par Xaintrailles, qui alerte Condé [7]. Il est bien tardif de s’occuper à quinze ans de ce qui correspond aux premiers gestes imposés au prince lors du passage aux hommes vers sept ans. Ce qui est subitement requis, c’est une tenue du corps parfaite, droite, des déplacements corporels maîtrisés, des gestes mesurés. Preuve que cela n’a pas été prioritaire dans l’éducation aristocratique. Les précepteurs jésuites devinent une attaque contre leur éducation.
Ainsi pendant presque une année (1684), les gestes du jeune prince vont être constamment épiés, le moindre progrès relaté, une rechute signalée avec des exigences croissantes. Deschamps reconnaît que le jeune prince fait des efforts [8]. Le jeune homme est réprimandé par son grand-père: « Le voyage à Chantilly lui a fait du bien. On le trouve un peu plus appliqué et moins enfant [9]». Mais quelques mois plus tard, Deschamps est désappointé: « Hier, il y a eu punition car les grimaces ont recommencé depuis quelques jours [10]».
Immature, non formé, le jeune prince reste de petite taille. Deschamps croit parfois déceler une croissance: « Il croît, ses jambes s’allongent [11]». Du Rosel cherche à rassurer Condé : « Les connaisseurs disent qu’il n’y a personne qui danse aussi finement et plus savamment que lui mais que sa taille est avantageuse à d’autres qui sont plus grands que lui [12]». Que le langage jésuite offre de finesse ! En 1685, la croissance occupe toujours les lettres : « Du Plessis (maître d’équitation) trouve qu’il se fortifie [13]», « son corps se transforme et s’allonge [14]». En fait, Louis resta de petite taille et n’eut jamais une belle prestance. C’est de notoriété publique puisque lors du carrousel de 1685, Mme de Sévigné interroge sa fille : « M le duc de Bourbon estoit-il joli ? de bonne foi comment paroissoit-il ? Approche-t-il la taille du marquis [de Grignan]? Ah, j’ai bien peur que non, je suis triste de voir tant de grandeurs et tant de disgrâces du côté de la taille [15]».
Pour améliorer sa tenue corporelle, rien de tel que la danse. L’apprentissage de la danse transforme un geste en posture et témoigne du rang du prince par le simple mouvement du corps [16]. Dès 1683, le maître de danse Favier qui n’est pas membre de l’Académie royale de danse, l’entraîne. Au début, il s’agit de redresser la position des pieds lors de la marche, pour le bon maintien du corps, de faire correctement la révérence, de dénouer les bras et les jambes parfois sous le regard des parents [17].
Rapidement, des pas de ballets et des chorégraphies très élaborées sont adaptés afin qu’il participe aux ballets de cour. Le 7 janvier 1684, il «a dansé mercredi devant Mme la duchesse qui fut très contente de sa danse, Mgr le duc a souhaité qu’on change quelques pas dans la Jacone [Chacone] ce qu’a fait Favier [18]». Doit-on croire les lettres qui affirment qu’il a reçu la consécration de deux des meilleurs danseurs de la cour et que les progrès continuent en octobre 1685 [19] ? Sa taille, son comportement et ses progrès ne furent sans doute pas suffisants puisqu’il ne danse pas au « petit opéra » de Lully joué à Fontainebleau où se produisent ses sœur et cousine, Mlle de Bourbon et la princesse de Conti [20].
Deuxième exigence nouvelle pour le jeune prince, le comportement face aux domestiques. Le duc de Bourbon a vécu dix ans au Collège avec ses condisciples dont on ne saura que peu de choses. Il y a acquis la certitude de sa supériorité, une certaine prétention et personne ne s’oppose à lui ni à ses accès de colère. Arrivé dans la maison Condé, il doit se confronter à sa famille et à la domesticité. Son immaturité l’a autorisé à se moquer sans retenue des valets avec une méchanceté allant jusqu’à l’injure [21]. Désormais, il lui faut apprendre à se comporter en prince face à ses serviteurs, à donner des ordres réalisables et à faire fonctionner une maison sous le contrôle de son gouverneur [22]. Le jeune homme mettra du temps à modifier ce comportement car un an après, de la Noue reconnaît: « il y a quelques jours qu’il ne joue plus de jeu de main, il tourmente moins ses valets [23]».
Parfaire la formation du prince savant
La nouvelle condition du prince à la cour impose des savoirs nouveaux. Le grand Condé, conscient des lacunes, espère faire de son petit-fils un prince savant. Pour cela, il organise un rattrapage des matières incorrectement assimilées et en ajoute d’autres à partir d’octobre 1684 [24].
La pratique de la religion ne souffre aucune faute. Les deux pères jésuites Alleaume et du Rosel qui suivent le jeune homme depuis le collège continuent à lui faire apprendre l’histoire sainte, la religion ainsi que la philosophie des dernières années du collège, la physique naturelle et cartésienne. La dévotion du prince est évaluée par des collègues comme le père Dozenne qui « a confirmé son pénitent […] on a dit la messe et Mgr le duc a communié avec des marques d’application à ce qu’il a fait dont on a esté édifiés. Le père Dozenne est fort content de la manière dont Mgr le duc de Bourbon l’a receu et des honnêtetés qu’il luy a faictes [25]». Lors du jubilé de janvier 1684 [26], Deschamps veille à ce que la communion, les stations et les prières publiques, accompagnées des jeûnes réglementaires pour un enfant de cet âge, s’accomplissent correctement [27]. Dans ce domaine, le prince est très appliqué et ses précepteurs n’émettent aucune critique. A Pâques 1685, Alleaume admire sa grande piété chrétienne : «elle est à un degré où l’on ne peut plus le retenir, rien ne l’a jamais touché si vivement [28]». Cette pratique ostentatoire de la piété, qui parcourt toute la période d’éducation, est imitée de celle du roi. Notons que par opposition, dans un préceptorat se déroulant en même temps, Fénelon impose une pratique intériorisée à ses jeunes élèves, le duc de Bourgogne et à ses frères [29].
Cela seul justifie la présence des Jésuites chez les Condé, présence exceptionnelle dans le personnel éducatif princier français d’autant que les années de collège sont achevées. Le père Talon, recteur du Collège de Clermont triomphe alors des critiques: «Qu’on vienne donc douter aujourd’hui de ses prophéties sur M. le duc de Bourbon, et mépriser le pédantisme de son collège ! […] Tout cela fait bien de l’honneur à notre collège; la poussière de nos hautes et basses classes n’a rien gâté» [30]. En effet, les jésuites ont craint les changements effectués dans cette éducation mais au moins, l’essentiel est réussi dans ce domaine, la religion. Sur ce point, les précepteurs Sauveur et la Bruyère ne peuvent leur porter ombrage.
L’approfondissement de l’Histoire, de la géographie et des savoirs politiques
La Bruyère et Sauveur ont été engagés depuis septembre 1684. Ces précepteurs sont choisis en dehors des jésuites du Collège, que ceux-ci ressentent comme une nouvelle critique. Il s’agit à juste titre d’une réorientation car La Bruyère est membre du groupe de réflexion, le Petit Concile, recommandé par Bossuet et Cordemoy ayant tous deux participé à l’éducation du dauphin.
Le programme mis en place comprend les savoirs suivants : l’histoire de France, la généalogie des familles régnantes, la géographie et les mathématiques au sens large. L’étude des auteurs latins est abandonnée, l’enseignement se fait désormais en français dans lequel le prince doit s’exprimer clairement. Une partie du programme identifiée entre février 1685 et juillet 1686 reprend l’histoire de France de Louis XI (1461-1483) au début du règne d’Henri II (1547-1559). Cinq règnes, ce qui est une progression faible en une année et demie de cours à raison de trois cours par semaine [31]. Le jeune homme lit, répète, réécrit le récit de l’histoire européenne avec une connaissance de toutes les familles princières et notamment des principautés allemandes, de l’Europe du Nord, de l’Empire et même «quelques maisons de femmes qui sont entrées par mariages dans votre branche de Bourbon [32]». Il détaille tous les règnes, les causes des choix politiques et diplomatiques [33]. Des digressions sur les guerres de Bretagne, les guerres d’Italie occupent de longs mois comme celles sur des points précis, la Hongrie et les turcs, l’ambassade de Gênes et le droit du roi, les intrigues de cabinet et le rôle des médiateurs. A cela sont associées la connaissance de la géographie européenne dont certains fleuves, la lecture des Principes de Descartes (abandonnée par les pères jésuites), des fables et des Métamorphoses d’Ovide en français.
Cet apprentissage répétitif et chaotique ne contribue pas à donner une idée directrice à un prince qui a déjà l’esprit confus. Non abouti, il ne parvient pas à lui faire acquérir des connaissances d’histoire contemporaine dont disposent d’autres princes du même âge.
Acquérir un savoir militaire rénové
La formation militaire était impossible dans un collège jésuite qui n’avait pas vocation à dispenser ce type d’enseignement. Il y a cependant certainement acquis les bases de l’enseignement mathématique. C’est par conséquent une nouveauté pour le jeune prince à qui l’art militaire est fondamental. Cet apprentissage intervient deux à trois ans plus tard que chez les autres princes. Condé choisit Joseph Sauveur qui donne un cours régulier deux à trois fois par semaine jusqu’en septembre 1686. C’est au tour du gouverneur Deschamps de se sentir déposséder de son rôle dans l’apprentissage militaire et de se retirer progressivement de l’éducation en 1687.
Joseph Sauveur avait cette supériorité d’être au fait des dernières techniques militaires et scientifiques à une époque où la science militaire se perfectionne, passant d’un apprentissage empirique à une théorisation technique. Ce mathématicien utilise de la géométrie, de l’algèbre dans ses cours de fortification, pratique en discussion dans le débat sur l’art de l’ingénieur face à celui de l’officier auquel réfléchissent alors Vauban, François Blondel, l’ingénieur La Londe.
Obligé de reprendre à la base les premières notions de mathématiques, de géométrie et de figures, Sauveur élabore avec ce cours princier l’un des premiers ouvrages pédagogiques de mathématiques appliquées à l’art militaire qui deviendra une référence [34]. Sauveur fait même exécuter un (rare) modèle de bois qui «a fait l’effet qu’elle en attendoit. J’ai heureusement corrigé le défaut de ce que chaque costé de fortification est différente en mettant une partie de ce modèle entre deux miroirs que j’ai fait faire exprès et qui représente une fortification entière sur un même dessin. Je l’ai portée chez M de la Londe selon l’ordre de Vôtre Altesse, il a bien vu faire un siège en forme sur de la terre que nous avions mis autour et attaquer la place selon la manière d’à présent. J’avois déjà ramassé des mémoires tirés des plus expérimentés ingénieurs. M La Londe a jugé nécessaire d’en faire tirer un dessin semblable pour M le commandeur de Louvois dont il a donné avis à M de Louvois [35]». Louis III de Bourbon n’assista, semble-t-il pas à la prise de fortin artificiel, ni à un camp militaire. La formation de prince guerrier grandeur nature semble pouvoir attendre. Un an plus tard, le 28 décembre 1686, il est doté du régiment du Bourbon-Infanterie et c’est comme colonel qu’il participe à son premier combat en septembre 1688 (20 ans) lors de la guerre contre la ligue d’Augsbourg sous les ordres du grand dauphin (26 ans). Bien que valeureux, il possède de passables talents militaires. Il remporta ses premiers succès militaires plus tard en 1692 au siège de Namur et à Steinkerque.
On pourrait considérer que l’art militaire, même enseigné par l’un des grands spécialistes de la théorie mathématique, a été minoré, comme si le prince héritier des princes guerriers de Condé se désinvestissait de cette fonction.
Etre un prince à la cour
Depuis qu’il est sorti du collège, le jeune prince est initié à la société de cour qu’il suit avec ou sans ses parents, transportant sa Maison et ses précepteurs d’une résidence royale à l’autre. Cette itinérance se rajoute à cette éducation déjà chargée. Les études pâtissent de cette concurrence que son père encourage.
L’art de la conversation dans les salons
Ce jeune homme, après l’isolement du Collège de Jésuites, doit apprendre à parler galamment aux dames, s’exprimer avec esprit, répliquer avec intelligence lors des soirées. Les salons parisiens se sont fondus dans la culture curiale avec l’émergence de la culture d’appartement grâce à Mme de Montausier, Mme de Montespan, les salons voisins du Faubourg Saint-Germain et bientôt Mme de Maintenon.
A Paris pour commencer son entrainement, il fréquente le salon ami de Mme de La Fayette. Pendant quelques mois, elle forme son jugement en lui envoyant ses contes, des livrets d’opéras comme le Roland de Segrais qu’il doit comparer à celui de Quinault dans la querelle des Anciens et Modernes qui s’engage [36].
A Versailles, son père le mène bientôt chez Mme de Montespan ou chez sa sœur, Mme de Thianges, dans cet entourage redoutable pour les mots d’esprit, ce « ton à la Mortemart ». Il doit y être en mesure de juger les œuvres qu’on lui propose et de tourner rapidement un compliment. Son entourage veut éviter les ignorances, les bévues liées à sa naïveté: « On a parlé sur les génies de la forêt et sur la variété de leurs ouvrages par ordre de SAS afin que s’il arrivoit qu’on en parla, il ne confondit pas ces choses-là [37]».
Participer aux activités curiales
Cette éducation pratique et concrète a pour objectif de former le parfait homme de cour qu’il doit être. L’initiation progressive occupe une grande partie des soirées dès 1684. D’abord, il est présent aux côtés de sa mère quand elle reçoit des visites [38]. Puis il est amené pour la première fois à Versailles à quinze ans, par son père en août 1684. Il assiste « au lever de Monseigneur et lui avoit donné la chemise. Il y retournera demain […] à Marly dimanche. […] On nous a dit que la cour étoit contente de lui, qu’il y avoit paru fort joli et sans embarras. Il a été un courtisan fort assidu, ne manquant ni le dîner, ni souper, je puis assurer VAS que partout où le roi étoit, il lui faisoit quelque honnêteté [39]». Les pères jésuites sont ravis de transmettre au grand-père les bonnes impressions de Bourbon à la cour: « il paraît à la cour le soir, se rend à la messe du roi […] il n’est pas embarrassé, l’air aussi libre et aussi fait que s’il avoit passé longtemps à Versailles [40]». Toutes ses actions sont analysées et relatées avec précision. Le roi le fait participer aux soirées d’appartement où il s’agit de jouer, voire de perdre sans s’emporter ? Quand il veut le juger en privé, Louis XIV le convie à Marly. Bientôt, en janvier 1685, le jeune prince doit porter une perruque, des habits somptueux que le roi et les courtisans admirent, notamment ses masques et déguisement lors des soirées de Carnaval de janvier 1685.
Le 19 avril 1685, le Jeudi Saint, le roi lave les pieds des pauvres et c’est la consécration pour la famille Condé : dans la procession des plats de la Cène, précédé par son père le duc d’Enghein, (Henri-Jules) grand-maître de la maison du roi, Louis, duc de Bourbon, suit directement le dauphin. Louis est second dans l’ordre de la procession, suivi du duc du Maine, du comte de Toulouse et des autres princes.
Si Dangeau n’évoque toujours pas le duc de Bourbon, le Mercure Galant de mars 1685 décrit pour la première fois ce jeune prince qui se distingue par l’originalité et la richesse de ses masques : «je ne dois pas oublier icy de vous dire que Monsieur le duc de Bourbon n’avoit encor pas fait de séjour à la cour, & qu’il y a paru au sortir de ses études avec un air, des manières & un esprit aussi libre que s’il y eust passé ses premières années & qu’il eust eu un âge plus avancé [41]». C’est une entrée apparemment réussie après tant d’inquiétudes sur les enfances et les grimaces. Le duc de Bourbon reçoit des compliments extérieurs valorisants alors que dans son privé, il est soumis aux rudes remarques des précepteurs.
L’art équestre
Il lui faut rapidement maîtriser les déplacements à cheval indispensables à tout homme de l’Ancien régime. Au collège, Louis III a fréquenté l’Académie de nobles où il a reçu des cours de danse, d’escrime et d’équitation. En revanche, l’art du manège s’apprend à un âge plus avancé afin que le corps soit suffisamment formé.
A partir de 1685, cet entraînement devient intensif car il s’agit de participer au carrousel organisé par le Dauphin. Le roi a en effet délégué à son fils l’organisation des fêtes de 1685 avec le thème alors classique du Roland furieux : le Carrousel des Galants Maures [42]. C’est ainsi que Louis de Bourbon-Condé commence à monter dans le manège de l’Académie de Duplessis (ou Du Plessis) en janvier 1685 [43]. Rapidement, il reçoit les félicitations d’un professionnel: « Il est vivement hardi à cheval. Du Plessis est surpris de l’y voir. Il m’a dit plusieurs fois qu’il en feroit un très bon homme à cheval [44]».
En février, il reçoit des félicitations d’un autre ordre: « Monseigneur est venu voir M le duc monter à cheval, il trouvoit qu’il y étoit fort poliment, il fit une reprise. Monseigneur lui dit qu’il seroit bon homme à cheval et qu’il ne paroissoit pas craindre les chevaux [45]». L’apprentissage en manège occupe tout le printemps 1685 et des mesures sont prises : «Duplessis lui interdit de grandes chasses et celle du cerf pendant trois mois car cet exercice détruit ce qu’il apprend au manège. Il n’est pas trop content mais il se console quand on lui dit que Monseigneur fut six mois sans chasser lorsqu’il apprit à monter. Monseigneur lui a envoyé un beau cheval pour sa consolation (100 pistoles) [46]». Il faut travailler dur car il s’agit de participer au grand Carrousel prévu avec le grand Dauphin. Le duc de Bourbon est accepté aux répétitions du carrousel qui se succèdent maintenant sous le contrôle du vieux duc de Saint-Aignan, spécialiste des spectacles royaux.
Selon Xaintrailles, «Duplessis travaille le mieux qu’il peut. M le duc de Bourbon monte deux fois par jour. Je crois que dans le temps du Carrousel, il ne sera pas des plus maladroits [47] ». Cette opinion est décisive car le 1er avril, honneur immense et inattendu, le roi nomme le duc de Bourbon (17 ans) à la place du prince de la Roche sur Yon (21 ans) [48] parti combattre les turcs en Hongrie. Le voici à la tête du quadrille de quarante cavaliers Zégris face au grand Dauphin qui mène les Abencérages. « M. le Duc [son père] avoit hésité quelque temps, si M. de Bourbon accepteroit cet emploi, et le Plessis [sic] le détermina en rassurant que M. de Bourbon étoit assez ferme à cheval et assez adroit pour se bien acquitter de cette charge-là [49]». Se succèdent alors tous les jours les répétitions, les courses de têtes, de dague, la revue des pages et des écuyers. Les lettres se font de plus en plus précises sur les coups réussis : deux dedans, sept dedans…, moins de réussite à cause d’une journée venteuse… En mai 1685, les entraînements ont lieu devant la cour et le marquis de Ferensac peut alors écrire au prince de Condé [le grand père]: « M le duc réussit très bien dans ses exercices de cavalerie que je ne puis m’empêcher de le mander à VAS, son cheval était difficile mais il exécuta des belles voltes, avec grâce et justesse. Après dîner, il y eu course de bague et de teste. Il fait sa cour à merveille [50]». Mi-mai, les lettres s’interrompent car les princes sont ensemble à Versailles et à Paris pour régler les derniers détails du carrousel jusqu’au grand jour, le 4 juin 1685. Le carrousel commence par une grande cavalcade dans les rues de Versailles pour faire admirer au public les quadrilles suivis des chars. Un ballet équestre, des jeux de bague et de tête constituent l’essentiel de ce magnifique spectacle qui se tient aux Grandes Écuries [51]. Le duc de Bourbon ne remporta rien mais fut un prince honorable face au Dauphin.
La chasse
Arts nobles par excellence, la vénerie et la chasse trouvent un lustre considérable dans les années 1680 dans les domaines cynégétiques proches des résidences royales. Se distinguer à la chasse est un moyen de se distinguer aux yeux des deux meilleurs chasseurs du royaume que sont le roi et Monseigneur.
Alors qu’il est relativement jeune, le duc de Bourbon est présent presque chaque jour aux chasses du roi, de Monseigneur ou du duc du Maine. Cette dépense physique considérable s’ajoute à toutes les autres activités. De la Noue raconte les chasses par le menu. «Il parut appliqué à remarquer le gibier et ayant vu un faisan le garda au roi qui s’en aperçut et dit voilà M le duc de Bourbon qui a vu quelque chose, le roi vint et tua le faisan [52]». « Tout le monde a trouvé qu’il piquoit fort bien qu’il avoit une fort bon petit her [sic] à cheval [53]». Mais très vite, le jeune homme met de l’excès dans ses chasses, commet des erreurs: «le duc suivit un lièvre dans les vignes avec une vitesse dont on fut étonné et si longtemps qu’il le lassa, ramené dans la plaine le lièvre n’allant plus que le pas fut pris par un petit chien. Le roi conta cela luy même à Monseigneur et ajouta qu’il étoit fort bien à cheval mais qu’il falloit prendre garde à luy de peur qu’il ne se tuast [54]». Ses chasses deviennent des combats au corps avec des sangliers acculés dans les toiles: « l’animal vint pour le charger, Mgr le duc de Bourbon l’attendit et luy donna un grand coup d’épée encore un autre quelques temps après qui l’acheva. Il est extrêmement hardy dans ses fortes occasions et tout le monde le dit en ce pays-cy, M de Montchevreuil nous en parloit encore ce matin. Cela ne luy fait pas une mauvaise réputation mais on craint toujours les accidens qui peuvent arriver, le sanglier blessa un peu son cheval à cette chasse [55]».
Dans sa précipitation, il tombe de cheval « dans des occasions où personne ne tombe. Il a trop de négligence en ces temps et trop de hardiesse en d’autres. Le roy lui a dit il y a deux ou trois jours de se modérer et qu’il étoit d’humeur à se casser le cou [56]». Tout son entourage le sermonne sèchement. Le père Talon demande même au prince de Condé de lutter « contre cette effroyable bravoure qui le porte à s’ébattre et à lutter contre des monstres qui sont à mon avis plus redoutables et plus dangereux que ne sont les diables que l’on chasse avec un peu d’eau bénite au lieu que les sangliers ne se rendent jamais qu’après la mort [57]». Comme le jeune homme se trouve devant une réprobation générale, « il commence à en paraître mortifié car auparavant il ne faisoit qu’en rire [58]». Quoiqu’il en soit, il vient d’acquérir très jeune à la cour, la réputation d’être un excellent chasseur. Dans ces apprentissages, le gouverneur a fait de son mieux, redressant ce qui n’était pas encore acquis à l’adolescence et tentant de surmonter les défauts physiques sans fâcher les parents.
Quel prince fut formé ?
A côté des activités de courtisan, on l’aura compris, le travail scolaire intéresse bien peu le prince. Déjà au Collège, il était souvent puni [59]. Sauveur se plaint directement au prince de Condé: « Je crois que si VAS lui fait remarquer le long temps qu’il employe à la division, elle l’engagera à travailler au moins quelques temps avec plus d’attention». Il est obligé de lui donner encore quelques leçons «de sorte qu’il n’aura pas profité de l’avantage que luy donne la grande vivacité et la facilité qu’il a pour les nombres à cause de son inapplication [60]».
Les parents attentifs exigent une audition hebdomadaire des progrès de leur fils. Le prince reste plus d’une heure sous le feu croisé des questions de son père ou de sa mère qui concernent tous les savoirs, histoire, religion, philosophie naturelle (physique). Cet examen oral hebdomadaire entre dans une stratégie de travail à l’égard du jeune homme [61] et devient un moyen permanent de pression: « Il a pour cela une application dont je suis content qui va encore s’accroître par le désir qu’à son Altesse Monsieur le duc de lui faire répéter de temps en temps : la nécessité de rendre compte l’intéressera beaucoup à bien étudier et me sera de quelque soulagement [62]». L’exemple ou le contre-exemple des autres princes est régulièrement utilisé «le duc nous ayant parlé en particulier des affaires de M de Conti, nous avons taché de lui faire dessus les réflexions que nous avons cru pouvoir lui être utiles [63]». L’émulation avec ses condisciples est utilisée: « M le marquis de la Chastre […] a présenté à M. le duc de Bourbon une thèse qu’il soutiendra mercredy prochain l’après dîner […] VAS aura la bonté de nous marquer si elle veut qu’il aille à cette thèse ou non [64]».
De surcroît, le jeune prince correspond avec son père dans une correspondance dont on n’a peu de reliquat. Elle entraîne le jeune homme à la réflexion morale et comportementale mais « le duc de Condé a été mécontent car M. le duc ne lui a point écrit, il déplore l’indolence avec laquelle il a laissé passer trop de temps sans écrire [65]». Ces lettres sont montrées aux éducateurs qui lui répètent la morale: « M le Duc de Bourbon m’a fait l’honneur de me monter la lettre écrite par VAS où il n’approuvoit point du tout ces enfances et lui ai dit que j’étois bien fâché de mander à VAS. Il me dit que sa ne ce veroit plus [sic] je vous avoue Mgr qu’il en na [sic] beaucoup moins que par le passé [66]». Le père Alleaume l’entraîne à faire des réflexions sur la religion et le règlement des mœurs : « j’ay tasché de luy faire faire sur tout ce qu’elle [la lettre] contient pour sa conduite, les réflexions nécessaires, il les a bien écoutées et je souhaite qu’il les mette en pratique [67]». Le jeune homme craint son grand-père qui le morigène régulièrement: « Nous ayant trouvé samedi dernier dans l’antichambre de VAS environ une heure avant son départ, il nous fit l’honneur de nous dire, je m’en vais étudier, je crois que je ferai mieux ma cour par là à Monsieur le Prince que d’attendre icy qu’Il passe, je vous prie de luy témoigner si vous le voyés. […] Depuis le départ de VAS, Mgr le duc de Bourbon a fait très exactement ses exercices ordinaires [68]».
Une faible attention causée par un trop plein d’activités
En dépit de ces contraintes, le prince ne parvient pas à corriger son inattention. L’emploi du temps du prince strictement organisé, ne lui laisse aucun instant de libre. En raison de la vie de cour, des chasses, des essayages de costumes, des changements de résidences, des répétitions, du manège, les études n’avancent pas au rythme prévu. Le délai est court puisqu’il semble improbable de continuer les études au-delà des dix-sept ans du prince. A tour de rôle, les maîtres se plaignent à mots couvert du surplus d’activités et protestent contre le manque de temps: « Favier me dit avant-hier qu’il viendra aujourd’hui et demain faire danser pour compenser le temps qu’il a été à Chantilly et que dans toute la semaine il viendra plus que les trois fois accoutumées [69][…] La préparation du carrousel, les chasses et la promenade avec le roi et Mgr nous ôtent du temps pour les études [70]…». Sauveur se plaint: « Si la chasse n’eust point occupé notre heure ordinaire [71] […] SA est parfois occupée ailleurs pendant le temps de nos leçons. SA s’applique bien sur la fin de la leçon mais nous sommes dans les mêmes peines pour l’oster de ses distractions dans les commencements [72]». Les maîtres signalent aussi la fatigue physique. Dans les soirées d’appartement à Versailles, il danse «mais pas si bien qu’il le fait d’ordinaire, l’Académie lui a rendu la cuisse un peu douloureuse» déplore De la Noue. Le prince est parfois complètement abattu et il lui arrive de dormir longtemps. En janvier 1685, la saturation est à son comble : «tout ce qu’on peut obtenir de luy présentement c’est que le maître à faire les armes et à dessiner se louent de luy plus que les autres […] il est fort gai, aimant les divertissements de la cour, les trouvant toujours trop courts [73]».
Même s’il s’agit de développer chez un prince la capacité d’adaptation, une grande force de travail et d’attention, la capacité de passer d’une activité à l’autre et surtout le fait de se donner entièrement à son activité de prince, il semble que le programme chargé tienne peu compte de la résistance physique et intellectuelle du jeune prince de seize ans.
L’opposition des différents précepteurs
Ces récriminations dénotent principalement les ambitions divergentes des précepteurs. Le gouverneur Deschamps a été écarté. Les pères jésuites se savent en sursis dans cette éducation qui s’achève et dans laquelle, au milieu de 1685, ils ne jouent plus un grand rôle [74]. L’organisation pragmatique, les ordres donnés par le père, les exigences du grand-père, les déplacements, le caractère du jeune prince qui s’affirme, tout donne l’impression d’une formation extrêmement dense à laquelle il manquerait une idée directrice.
Dès janvier 1685, La Bruyère se sent désavoué par les autres éducateurs qui flattent le duc et rapportent la crise qui couve: « M de La Bruyère n’en est pas si content, il me paroit résolu à s’en plaindre ». Le duc prend des mesures. «M le duc de Bourbon fut un peu affligé au commencement de l’étude. M. son père l’avoit extrêmement grondé sur ses inapplications à tous les exercices quoiqu’à dire le vray, elles ne sont pas toutes grandes mais cela fera toujours un bon effet et empêchera qu’elles croissent [75]». Xaintrailles lui-même le réprimande : « Il paroit qu’il a une très grande envie de ne plus être distrait et qu’il se tient sur ses gardes là-dessus, il reçoit parfaitement bien ce qu’on prend la liberté de lui dire, je ne lui donne aucun avis qu’il ne me commande de continuer [76]».
Pour en juger objectivement, le prince fait venir un témoin avisé, Bossuet [77]. La Bruyère s’assure ainsi du soutien du grand Condé : « Une lettre que Votre Altesse a écrite, il y a bien quinze jours, à M. le Duc a fait ici le mieux du monde. Je m’en suis trouvé soulagé par un renouvellement d’attention qui m’a fait deviner, Monseigneur, que vous aviez parlé du ton qu’il faut, et M. le Duc me l’a confirmé. Dès que l’application tombera, je vous en avertirai ingénument». La Bruyère revendique la direction des études :« Je voudrais de toute mon inclination avoir six grandes heures par jour à bien employer auprès de Son Altesse : je vous annoncerais d’étranges progrès, du moins pour mon fait et sur les choses qui me regardent. Et si j’avais l’honneur d’être chargé de tout, comme j’ai eu le plaisir de le croire, j’en répondrais aussi sûrement; mais j’ai des collègues, et qui font mieux que moi et avec autant de zèle [78]» . Cinq jours plus tard, il reçoit une lettre du Prince qui contient l’approbation explicite de sa conduite. De son côté, La Bruyère surveille le travail de Sauveur: «J’ai été présent aux trois dernières leçons de M. Sauveur, et je puis assurer Votre Altesse Sérénissime qu’elles se passèrent avec assez d’application de la part de Monseigneur le duc de Bourbon; il me parut entrer aisément dans toutes les choses dont il s’agissait; il entendra toujours sans peine tout ce qui est de pure pratique, ou du moins les choses qui contiennent plus de pratique que de spéculation. […] Il me semble que la méthode de M. Sauveur est la bonne, qu’il n’y a rien de superflu, et que tout y tend à une connaissance exacte de la fortification [79]». Mais les études n’avancent pas.
Une ferme reprise en main
En effet, le jeune prince est de plus en plus présent à la cour aux côtés de son père. Le duc reçoit une lettre comminatoire du prince le 16 août 1685: «Je ne puis m’empêcher de vous témoigner qu’il me revient de tous côtés que votre fils va tous les jours à la chasse. J’appréhende que ce violent exercice, et particulièrement la chasse au loup, qui est la plus violente du monde, ne le fasse malade. Prenez-y garde; cela l’empêche d’étudier. Il deviendra fort bon veneur, mais ignorant dans tout ce qu’il faut qu’il sache. Il est à vous à y remédier et à songer à sa vie, à sa santé et à sa bonne éducation. Je vous prie de n’attendre pas à y remédier quand il ne sera plus temps [80]». Le Prince prend l’initiative de sévir. Il vient spécialement à la cour annoncer notamment que « M. de Briord avait la charge de premier gentilhomme de la chambre de M. le duc de Bourbon; il fera même en quelque façon les fonctions de gouverneur, mais il garde la charge de premier écuyer de M. le Duc [81]». Voici le jeune homme soumis à un nouveau gouverneur, familier de son grand-père. Cette nomination est un désaveu de M. le duc qui, aux yeux de son père, ne suffirait pas à éduquer son fils. Le conflit entre le père et le grand-père concernant les objectifs éducatifs du petit-fils vient d’éclater au grand jour.
En octobre 1685, le duc de Bourbon répond par un règlement des horaires et une discipline ferme « pendant le séjour de Fontainebleau. Il se lève à 9 heures car il se couche tard. Il entend la messe à midy. Il étudie alternativement avec Sauveur, La Bruyère, M de Brior […] Monseigneur le duc parust ne rien dire à Monseigneur son fils qu’il ne fut bien déterminé à luy faire sentir et sans colère. Il lui dit tout ce qui se pouvoit dire de mieux [82]». Il maintient cependant la totalité des activités curiales.
Le jeune duc atteint les objectifs souhaités par son père
Devenir le Grand maître de la Maison du roi
La charge de Grand maître, une des plus grandes charges du royaume, est attribuée traditionnellement aux Condé, sauf exception pendant la Fronde. En 1660, le roi demanda au grand Condé de résigner sa charge en faveur de son fils, Henri Jules. Maintenant il s’agit d’assurer la première transmission au propre fils de ce dernier, Louis III et de le former dans cet objectif.
Le Grand maître de la Maison du roi dirige tous les officiers de la Maison civile du roi. Il dirige un des quatre secrétariats d’Etat, après la Guerre, la Marine et les Affaires étrangères. Il contrôle les nominations, leur assigne leurs devoirs, reçoit les serments, établit les quartiers des officiers, gère le budget et exerce une surveillance rapprochée à la cour et dans le personnel domestique et ministériel. Autant de raisons d’être craint, envié, courtisé en raison des opportunités offertes à sa clientèle. Dans ce cas précis, cette formation doit être particulièrement minutieuse [83].
Pour ce faire, un savoir nouveau est nécessaire, celui des familles, du nobiliaire, du blason et des alliances, associé la connaissance des rangs et de l’étiquette, des gestes curiaux. Il s’agit également de déterminer des armes, des blasons, des livrées. C’est d’abord son gouverneur qui s’en charge. En novembre 1683, Deschamps fait répéter chaque jour au jeune prince tous les détails de la maison du roi et officiers de la couronne « enfin toutes autres choses de cette nature qui pouvaient tomber en conversation, et qu’il fallait nécessairement savoir [84]». Cependant, en janvier 1684, le jeune prince commet une faute grave, il n’a pas reconnu chez Mme de la Fayette, le duc et la duchesse de Richelieu, pourtant proches de la famille Condé [85]. C’est pourquoi La Bruyère, désormais chargé de cet apprentissage, change de méthode et lui fait apprendre les Maisons par cœur à l’aide des Etats de la France en 1685 et 1686, ces répertoires si aisés pour les historiens mais que l’on imagine si rébarbatifs à réciter. Et l’élève répète avec d’évidentes difficultés les familles, les alliances et les dynasties.
Devenir le gendre du roi
A seize ans, il convient d’établir le prince. Rien ne filtre des discussions entre le prince de Condé et son fils au sujet de Louis III. L’ambition d’épouser une fille même illégitime du roi assurerait un prestige sans égal et rehausserait la maison de Condé tout en rétablissant le parallélisme avec ses cousins Conti. C’est le grand Condé qui négocie le mariage avec le roi. Puis en août 1684, son père «le mena hier chez Mme de Thianges où estoit M. le duc du Maine et Mlle de Nantes [86]». Le projet mûrit pendant l’été 1685 où il est souvent invité chez Mme de Montespan à Clagny. « Il est moins embarrassé avec les filles comme il l’étoit auparavant, il s’est apprivoisé chez Mme de Montespan [87][…] Il me paroit que Mgr commence à se piquer au jeu, ses assiduités augmentent, il redouble ses empressements, la princesse fait la petite maîtresse le plus joliment du monde. Il a envie de plaire [88]». Et pour plaire à sa fiancée, l’élève réticent se pique même de vouloir apprendre l’espagnol.
A partir de l’annonce de ce mariage, les mémorialistes commencent à s’intéresser au jeune duc, critiquant l’ambition des Condé associée à l’illégitimité. Le mariage se déroule le 24 juillet 1685 dans un luxe extrême. Mme de Sévigné« aime la patience du duc de Bourbon dans ce grand lit avec sa petite épousée à dix pas de lui ; il est vrai qu’avec de tels enfants, il ne falloit pas douter que le sablonnier en passant sur le minuit ne leur servit de garde, Monsieur le Prince et Mme de Langeron étoient inutiles […] quelle noce ! quelle magnificence ! quelle triomphe! [89]». La cour en profite pour se moquer de ce mariage non consommé.
Obtenir les entrées que n’a pas son père
L’un des objectifs du mariage du duc de Bourbon était d’obtenir les grandes entrées que n’avait pas son père et d’être ainsi à égalité avec son cousin. Depuis un an, le 29 août 1684, le prince de Conti de la branche cadette des Condé, époux de l’aînée des filles du roi, avait en effet reçu les grandes entrées. Elles permettent de rencontrer le roi en privé, d’entrer dans sa chambre dès qu’il était éveillé, avant qu’il ne sortît du lit et prît sa robe de chambre, en même temps que les premiers gentilshommes de la chambre. C’est un honneur envié.
Le 23 juillet 1685, c’est chose faite, «le roi lui a donné la survivance des charges de M. son père et toutes les entrées chez lui, comme il les a données à M. le prince de Conty et à M. du Maine [90]». Mais ce sera mieux encore. Les princes de Conti, partis en Hongrie sans ordre du roi pendant l’été 1685, le dénigrent dans leurs lettres, ce qui entraîne la colère royale. Le prince de Condé, leur oncle, se déplace personnellement plusieurs fois à la cour pour désamorcer ce ressentiment et en contre-partie « le roi a dit à M. le Prince qu’il vouloit ôter à M. le prince de Conty les grandes entrées qu’il lui avoit données [91]».
Etre le gendre du roi, avoir les grandes entrées, être reconnu comme étant l’un des meilleurs cavaliers et chasseurs de la cour, bien faire sa cour au roi, tout réussit au jeune prince de Bourbon et une partie des objectifs de l’éducation du père sont atteints. Bientôt, à Fontainebleau, le couple aura un bel appartement pris à M de Bouillon et au maréchal de Villeroi. Il reste juste à attendre la consommation du mariage avec une princesse à peine âgée de treize ans. Le prétexte attendu est le retour de son père des Etats de Bourgogne. «Il veut aller à Chantilly, mais il a peur que VAS soit fâchée, il y a quelque petite raison que vous n’avez guère de peine à deviner [92]». Finalement le jeudi 25 avril 1686, le roi en donna l’autorisation et « M. le duc de Bourbon coucha pour la première fois avec madame sa femme; leur grande jeunesse avoit empêché qu’on ne les laissât ensemble jusqu’à ce jour-là [93]». De la Noue prévient Condé depuis Versailles « la consommation du mariage ne lui a pas fait de tort [94]».
Le jeune couple s’entend fort bien et fait les délices de la cour et des soirées. Cependant rien ne change puisqu’un nouveau plan d’études est établi. Les études quotidiennes étant de plus en plus concurrencées par les activités de la cour, La Bruyère sollicite en dernier recours le grand Condé: «Son Altesse a besoin que vous lui déclariez Monseigneur que vous voulez très absolument qu’il sache très bien la géographie, cela peut être me soulagera [95]». Puis blasé, il écrit : « Cela diminue un peu le temps destiné aux études, mais il n’y a point de remède: je me réduis à employer utilement auprès de Son Altesse les heures que cet exercice nous laisse [96]». Le 4 avril 1686, même Briord se plaint et indique la cause de ce changement: «Mgr le duc de Bourbon va assez souvent avec Monseigneur: cela dérange un peu les autres exercices. On l’avertit qu’il passe pour grossier et malhonnête. Je ne sais quand ce qu’on lui dit fera bien son effet [97]». Que dire contre le fils du roi et ses amis alors que toute la cour est satisfaite du courtisan? Marié, bon prince, futur grand Maître, le jeune homme tente de s’émanciper alors que se prépare le voyage d’automne à Chambord. De nouveau, les précepteurs lui trouvent beaucoup moins d’attention. Le duc fait de fortes réprimandes à son fils qui n’en tient plus compte et part chasser avec le Dauphin et des courtisans légers à Anet chez Vendôme. L’éducation intellectuelle est terminée. Condé a compris que Bourbon ne ressemblerait jamais au prince de Conti.
Cependant la représentation du prince à la ville et sa transcription dans les gazettes ne souffrent aucune critique : « M le duc de Bourbon est un jeune prince qui commençant à entrer dans le monde, n’y a fait encore aucun pas qui n’ait marqué avec avantage qu’il soutiendra dignement & l’auguste nom qu’il porte & la gloire des grands hommes qu’il a pour ayeux. Il s’est fait admirer dans ses études & il n’en estoit pas encore sorty qu’il a brillé dans ses exercices. Ainsi l’on peut dire qu’il y a paru habile dans un temps où l’on en voit peu qui ayent commencé un si pénible travail. Si son application luy a donné de l’adresse, le sang des Bourbons & le désir de la gloire luy ont donné la force qu’il [sic] luy manquoit. Sa bonne grâce jointe à toutes ces choses, l’a fait admirer dans le carrousel & il y a receu des applaudissements si publics qu’ils ont été entendus de toute l’assemblée. Un prince si accomply dans un âge où les autres n’ont pas encore respiré l’air du monde meritoit d’estre uny à une princesse toute parfaite [98]». Sourches, Dangeau, Mme la Palatine n’en disent rien encore. Pour marquer l’établissement de Louis de Bourbon, son père Henri-Jules organise en juillet 1688 à Chantilly une fête superbe offerte au grand Dauphin en réponse au Carrousel de 1685, fête qui dure huit jours avec des opéras, des chasses et un record de dépenses plus de 300 000 livres.
Conclusion
Roger Chartier demandait de s’interroger sur « les pratiques qui visent à reconnaître une identité sociale, à exhiber une manière particulière d’être au monde, à signifier symboliquement un statut et un rang, enfin des formes institutionnelles et objectivées grâce auxquelles des représentants marquent de façon visible et perpétuée l’existence du groupe, de la communauté ou de la classe [99]». Cela est possible pour un prince. Mais se pose alors un problème d’échelle qui est celui de l’unicité. En l’insérant dans le réseau social et les obligations extérieures, ce personnage raconte une situation sociale caractérisée par la cohérence et la cohésion du groupe familial, un groupe solide qui cherche à renforcer sa position en fonction du peu de choix possibles à la cour. Cette étude montre que la construction d’une identité forte s’accompagne d’une préparation minutieuse, de plus d’une dizaine d’années d’apprentissage de savoirs, de comportements de référence et de savoirs nouveaux dans un espace social très réduit. On a observé ainsi en direct le fonctionnement de la norme imposée par les parents. Son père a obtenu les trois objectifs qu’il poursuivait. Son grand père, pourtant à l’origine du projet éducatif qui devait faire de son petit-fils un prince cultivé et reconnu comme tel, a vu le trajet s’en écarter.
L’identité du prince en a-t-elle été modifiée par le trajet qu’il s’est choisi [100]? Médiocre collégien, il était intéressé par le regard de ses condisciples. Elève contraint et rabroué, il sera un prince sûr de son rang, un courtisan assidu et sans faiblesse. Elevé avec des contraintes fortes et un sentiment de puissance, son caractère n’a jamais été émoussé par ses éducateurs. Les mémoires retiendront un prince vétilleux sur l’étiquette et le rang, ni savant, ni brillant : « «M le duc a du cœur et des sentiments élevés, il n’est pas aussi plein de bassesses que Monsieur son père, mais il s’enivre tous les jours et c’est une vraie bête pour la brutalité» (avril 1701) [101]».
Article publié en allemand sous le titre "Sorgfalt und Strenge. Die Bildung eines Prinzen von Geblüt : Louis III. de Bourbon-Condé, 1680-1688", dans J. Jacobi et al. (Hg.), Vormoderne Bildungsgänge. Selbst und Fremdbestimmung in der Frühen Neuzeit, Köln, Böhlau Verlag, 2010, p. 243-262.
Notes
[1] Beguin Katia, Les princes de Condé, Rebelles, courtisans et mécènes dans la France du grand siècle, Seyssel, Champ Vallon, Paris, 1999.
[2] Henri III Jules de Bourbon-Condé (1643-1709) appelé Monsieur le duc. Anne Henriette Julie de Bavière, princesse Palatine (1648-1723).
[3] Louis II de Bourbon-Condé (1621- mort à Fontainebleau le 8 septembre 1686), appelé Monsieur le Prince (de Condé), le grand Condé.
[4] «C’étoit un homme sage avec de l’esprit, fort mêlé dans la meilleure compagnie, mais qui l’avoit gâté en l’élevant au dessus de son état et qui l’avoit rendu important jusqu’à l’impertinence. C’étoit un gentilhomme tout simple et brave, mais qui n’étoit rien de moins que Poton, qui est le nom du fameux Saintrailles [compagnon de Jeanne d’Arc] », Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint Simon sur le siècle de Louis XIV et la régence, A. Cheruel (éd.), Paris, Hachette, 1856-1858, tome V, p. 164.
[5] Jean-Augustin Deschamps ( - 28 février 1687).
[6] « Les enfances dont j’avois dit quelque chose à VAS dans ma dernière lettre et qu’elle me commande de lui marquer en détail consistent principalement à demeurer avec des enfants dès qu’il peut en trouver l’occasion et s’y occuper longtemps de rien ou de choses d’enfant et souvent de ne vouloir pas finir quand on l’avertit. Il avoit repris depuis quelques temps l’habitude de courir toujours sitôt qu’il entroit dans un appartement et dès en sortant du sien au hasard de se blesser comme il luy est pensé arriver plusieurs fois et quoiqu’on pust luy dire cela ne finissoit point, l’habitude d’estre toujours de travers soit qu’il marche ou qu’il soit arresté, est une des choses sur quoy on luy parle souvent et assez inutilement quoique Monseigneur le duc et Madame la duchesse l’aient fort recommandé et qu’on voye le tort que cela peut faire à sa taille». 13 janvier 1684, Archives de Chantilly, série P, volume XCIII, (abrégé : AC série P) f. 186.
[7] «Je souhaiterai qu’entre les biens que le jubilé [de 1684] doit faire, il puist un peu diminuer les restes d’enfance dont l’habitude n’en finit pas comme on voudroit. Elle est quelque fois monstrée de manières brusques et peu agréables dont on ne veut point se défaire quelques remontrances qu’il y ait, VA comprend bien qu’il faut que ie l’ayt tenté plusieurs fois inutilement puis que je prins la liberté de luy en dire un mot avant-hier». Le 9 janvier 1684, AC série P, vol. XCIV, f. 130.
[8] «Il me paroit que depuis ce temps il prend plus garde à luy, il a cessé tout à fait de courir dans les appartements et il me semble plus modéré dans le reste je voudrois qu’il voulut prendre garde à sa taille » . Le 13 janvier 1684, AC série P, vol. XCIV, f. 187. « Il y a toujours un peu de jeunesse à ce que fait Mgr le duc de Bourbon mais il est certain que ça diminue tous les jours». Janvier 1684, AC série P, vol. XCIV, f. 202.
[9] 15 avril 1684, AC série P, vol. XCV, f. 313 (Alleaume).
[10] 1er juin 1684, AC série P, vol. XCVI, f. 11.
[11] Idem.
[12] 6 janvier 1685, AC série P, vol. XCIX, f. 21.
[13] 20 février 1685, AC série P, vol. C, f. 6.
[14] 16 avril 1685, AC série P, vol. C, f. 207.
[15] C’est la première fois qu’elle en parle. Marie de Rabutin-Chantal, Marquise de Sévigné, Lettres de Madame de Sévigné, Paris, Pléaide, 1953, tome III, p. 74, n° 789.
[16] «La danse commune est si propre à dresser le corps, à former la grâce & à relever l’action d’un jeune prince, qu’on ne doit nullement omettre de lui en faire prendre des leçons, de la façon dont on a accoutumé de les donner à ceux de sa naissance », François de La Mothe le Vayer, De l’Instruction de Monseigneur le dauphin, Paris, chez Sébastien Cramoisy, imprimeur ordinaire du Roy, 1640, vol. I. p. 231.
[17] « SAS assista à la danse. Elle trouva seulement quelque chose à dire à ses bras et à son pied droit qu’un peu d’application pourroit aisément corrigé». 13 janvier 1684 AC série P, vol. XCIII, f. 18 (Deschamps). Même événement vu par Charles-Armand de La Noue du Vair : « Favier vint hier et fit danser Mgr le duc de Bourbon devant leurs altesses qui furent très contentes de sa danse et des pas de jaconne que Favier montre présentement à Mgr le duc de Bourbon. M le duc trouva pourtant quelque chose à redire sur la cadence».
[18] 7 janvier 1684, AC série P, vol. XCIII, f. 104 (de la Noue). Il apprend une Chaconne, danse venue d’Espagne, très en vogue au XVIIème siècle qui se dansait sur un air à 3 temps. Ce morceau de danse fut exécuté par des danseurs professionnels « le Samedi 21 octobre (1684) Favier et Pécourt dansèrent la chaconne du dernier opéra ». Philippe de Courcillon de Dangeau, Journal d’un courtisan à la cour du Roi Soleil, Paléo, 2002, tome 1, p. 57.
[19] Monsieur, frère du roi (1640-1701) « a dit trois ou quatre fois à M de Villeroy qu’il dansoit fort bien ». Le maréchal de Villeroy (1644-1730), 14 janvier 1685, AC série P, vol. XCIX f. 59. « Il y eut danse chez Mme la duchesse ce qu’il fait tous les soirs, il danse beaucoup mieux depuis quelque temps». 26 octobre 1685, AC série P, vol. CIII, f. 178.
[20] Louis-François Du Bouchet, marquis de Sourches, Mémoires du marquis de Sourches sur le règne de Louis XIV, Cosnac et A. Bertrand (éd.), Paris, Hachette, 1882-1893, tome I, p. 307, note 2 (accès par https://cour-de-france.fr/article511.html). Le temple de la paix (6 entrées, Quinault), Fontainebleau, 20 oct. 1685.
[21] «Depuis longtemps les quolibets avoient recommencé et une manière dure de dire des choses désagréables aux gens sans sujet et de vouloir se moquer à tout propos comme cela continue et que Monseigneur le duc s’accoutumoit mesme à vouloir se soutenir contre ce qu’on luy en disoit, j’en parlay à Madame la duchesse d’abord en particulier et ensuite je luy en parlay devant luy un jour avant que d’en écrire à VAS». 13 janvier 1684, AC série P, vol. XCIII, f. 186 (Deschamps).
[22] «Ce qui me paroit plus à observer c’est l’envie de se moquer et la disposition à dire des choses dures parce qu’elle paroit assez dans le naturel […] je parle ingénument à VAS comme un homme qui a de bonnes intentions dans lesquelles il peut manquer les lumières». 13 janvier 1684, AC série P, vol. XCIII f. 186 (Deschamps).
[23] 20 février 1685, AC série P, vol. C, fol. 6.
[24] «Si Votre Altesse veut absolument que Monsieur le duc de Bourbon soit savant », Jean de La Bruyère, Œuvres complètes, J. Benda (éd.), Paris, La Pléiade, 1934, lettre XII, p. 668.
[25] Dimanche 23 décembre 1685, AC série P, vol. CIV f. 318 (Du Rosel). Pierre d’Ozenne (1657-1728) théologien et orateur, recteur du Collège d’Alençon vers 1672.
[26] C’est le jubilé papal pour célébrer la victoire contre les turcs.
[27] 9 janvier 1684, AC série P, vol. XCIV f. 130. « la santé est bonne et le jubilé ne l’a point altérée. Il a fait maigre jeune par ordre de la duchesse le vendredi ; le samedi aujourd’hui, il a esté prié à Saint Sulpice, faire station et communier » (Deschamps).
[28] Lundi 16 avril 1685, AC série P, vol. C, fol. 207.
[29] Il s’agit bien d’ostentation publique puisqu’en privé :«Je [Gourville] demandais un jour à Mme la duchesse de quelle religion était la princesse sa fille qui pouvait avoir treize ou quatorze ans et qui était fort bien faite. Elle me répondit qu’elle n’en avoit point encore, qu’on attendait de quelle religion serait celui qu’elle épouserait afin de l’instruire dans la religion de son mari, soit protestant soit catholique». Jean Hérault, sieur de Gourville, Mémoires de Monsieur de Gourville, Paris, Mercure de France, 2004, p. 254.
[30] AC p. XCVI f 139.
[31] Lettres publiées sans exception par rapport aux archives de Chantilly dans La Bruyère, Œuvres complètes. Début février 1685, il a fini Louis XI. En avril, « le règne de Charles VIII est fort avancé ». Le 7 juillet, « la vie de Louis XII peut être présentement à moitié». Le 13 août, « il est précisément à la moitié de la vie de ce prince » [Louis XII] qu’il achève le 18 août. Le 2 octobre, il a «quatre longs entretiens sur l’histoire de Louis XII qui s’achemine par là vers sa fin». Le 22 octobre, « il y a trois jours qu nous avons achevé d’écrire la vie de Louis XII, je la répète encore une fois à Monsieur le duc de Bourbon afin qu’il la sache mieux. Je ne le ferai plus écrire et commencerai à lui faire lire les mémoires à François 1er ». Six jours après, il a encore un « entretien sur la bataille de Ravenne et ainsi nous voilà à la fin de la vie de Louis XII». En mars 1686, il apprend la bataille de Pavie. En juillet, il entreprend la lecture de l’Abrégé de Mezeray sur Henri II.
[32] Ibid., p. 655.
[33] « Je lui fis rendre compte de la généalogie de François Ier et comment il avait succédé à Louis XII, quelles prétentions il avait sur le duché de Milan contre la famille des Sforces usurpateurs, son entreprise sur le Milanez, le passage des Alpes; opposition des Suisses, la surprise de Villefranche, où était Prosper Colonne avec les troupes du pape, tout le détail de la bataille de Marignan, les fruits de cette victoire, l’abouchement du Roi avec Léon X, la mort de l’empereur Maximilien, les brigues de François Ier et de Charles, roi d’Espagne, pour être élevés à l’Empire, les fautes du premier dans le cours de la négociation, les motifs et les raisons des princes allemands pour l’exclure et lui préférer Charles-Quint. Voilà, Monseigneur, les choses sur lesquelles j’interrogeai M. le duc de Bourbon, qui répondit fort bien à tout, en bons termes; il parla bien trois petits quarts d’heure de suite, avec beaucoup de netteté et de jugement. Mme la Duchesse lui fit de son côté quelques questions auxquelles il satisfit sans hésiter ».
[34] Géométrie élémentaire et pratique de feu Joseph Sauveur, revue et corrigée par M. Le Blond, contenants les Éléments de géométrie avec figures, Rollin, Paris, 1753.
[35] 15 août 1685, AC série P, vol. CII f. 130. M. N. La Londe est apprécié de Vauban qui le reconnaît comme spécialiste de certaines fortifications et notamment de Philipsbourg où il meurt en octobre 1688. Le Sr de La Londe participe également à la théorisation des écrits militaires en étant l’auteur d’une Arithmétique des ingénieurs en 1685 et d’Élémens de fortification. Première partie, qui contient l’arithmétique de l’ingénieur françois, où l’on verra plusieurs nouvelles méthodes qui abbrègent et facilitent extrêmement les calculs des toisez de la maçonnerie, des terres et de la charpente, Vve de D. Nion, in-4°, Paris, 1685.
[36] 23 janvier 1685, AC série P, vol. XCIX f. 159 (Deschamps).
[37] Jeudi 14 février 1685, AC série P, vol. XCIX f. 359 (Du Rosel).
[38] «Il passa la journée chez Mme la duchesse et joua à la bassette avec Mlle de Bourbon assez honnêtement M le chevalier de Longueville eut l’honneur de jouer au billard et au vollant avec Mgr le duc de Bourbon lequel joua fort bien». Janvier 1684, AC série P, vol. XCIV f. 202.
[39] Samedi 4 août 1684 AC série P, vol. XCVI f. 134. On ne dispose pas du témoignage de Dangeau qui est absent.
[40] 8 janvier 1685 AC série P, vol. XCIX f. 29 (Du Rosel).
[41] Mercure galant, p. 206.
[42] Du 8 janvier au 3 mars 1685, un opéra Orlando en français est joué à la Cour sur une musique de Lully.
[43] « Maître Rousseau lui a donné sa première leçon à monter, il fut regardé par de la Noue». Rousseau Pascal, maître d’arme du roi, 8 janvier 1685 AC série P, vol. XCIX f. 29 (Du Rosel).
[44] 29 Janvier 1685 AC série P, vol. XCIX f. 210.
[45] Monseigneur le dauphin, fils de Louis XIV (1661-1711), 27 février 1685, AC série P, vol. C, fol. 42 (de la Noue).
[46] Samedi 24 février 1685, AC série P, vol. C, fol. 46 (Alleaume).
[47] Avril 1685 AC série P, vol. C, fol. 147.
[48] François Louis de Bourbon-Conti, comte de La Marche, comte de Clermont, prince de La Roche-sur-Yon (1664-1709).
[49] Dangeau, Journal, tome I, p. 146.
[50] 4 mai 1685, AC série P, vol. C, fol. 325.
[51] La brillante journée ou le carrousel des galans maures entrepris par M le dauphin avec la comparse, les courses et des madrigaux sur les devises, Veuve Blageart, Paris, 1685.
[52] Jeudi 11 octobre 1685, AC série P, vol. CIII f. 336.
[53] 11 février 1685, AC série P, vol. XCIX f. 326.
[54] Lundi 2 avril 1685 AC série P, vol. C, fol. 101.
[55] Samedi 13 octobre 1685, AC série P, vol. CII f. 375.
[56] 16 octobre 1685, AC série P, vol. CIII f. 22.
[57] 16 octobre 1685, AC série P, vol. CIII f. 21.
[58] 18 octobre 1685, AC série P, vol. CIII f. 59.
[59] « Encore qu’il fut de jour de congé, il n’alla point dîné à l’hôtel de Condé, les pères me recommandèrent de le faire étudier près de trois heures l’après-midi, je rends compte à Mme la duchesse qui le gronda bien. Le soir précèdent, il a été inappliqué sur des choses qu’on lui avoit déjà répétées une infinité de fois. Je ne m’embarassois pas de fautes particulières si je ne les voyois pas appuyées de cette distraction générale jointe à une grande indifférence fort éloignée de la sensibilité qui seule peut donner les moyens de corriger, ce qui oblige à redoubler les soins ; il me semble néanmoins que l’on a gagné quelque chose sur lui pour le faire un peu plus penser à se tenir droit au moins il n’est pas si souvent de travers». Le 1er juin 1684, AC série P, vol. XCVI f. 11.
[60] Dimanche 3 septembre 1684 , AC série P, vol. XCVI f. 211.
[61] « Je le fais souvenir que le temps s’approche qu’il faudra rendre compte à VAS de ses études». Le 26 octobre 1685, AC série P, vol. CIII f. 178.
[62] 28 octobre 1685, La Bruyère, Œuvres complètes, p. 664. AC série P, vol. CIII f. 242, f.195.
[63] 9 avril 1685, AC série P, vol. C, fol. 159 (Du Rosel).
[64] Samedi 15 janvier 1684, AC série P, vol. XCIV f. 200, 204 (du Rosel).
[65] Vendredi 1er février 1686, AC série P, vol. CV f. 334.
[66] 6 septembre 1684, AC série P, vol. XCVI f. 238 (de la Noue).
[67] Dimanche 14 octobre 1685, AC série P, vol. CII f. 414.
[68] 27 novembre 1685, AC série P, vol. CIV f. 134.
[69] 7 janvier 1684, AC série P, vol. XCIV f. 104 (de la Noue).
[70] Vendredi soir 4 mai 1685, AC série P, vol. C, fol. 335 (Alleaume).
[71] 15 octobre 1685, AC série P, vol. CIII f. 5 (Sauveur).
[72] Idem. Sauveur reconnaît: « J’ai remarqué que quand l’âge et les occasions le feront regarder plus sérieusement les pratiques de géométrie il en viendra tout à fait à bout lui-même aussi il lui faudra fort peu de choses pour le remettre dans le bon chemin, parce que la bonté de son esprit et ce qu’il a de principe le rendent supérieur à cette science. Il entend fort bien l’usage du compas à proportion, à faire les cartes d’un pays». 5 juillet 1685, AC série P, vol. C, fol. 420. Ces plaintes portent leurs fruits pour un temps:« M le duc m’a ordonné de rester pendant la durée du séjour, la disposition que M le duc est à présent à l’égard des mathématiques me fait abandonner avec plaisir le reste de mes affaires à Paris ». Fin octobre 1685, AC série P, vol CIII f. 95, f. 85.
[73] Lundi 22 janvier 1685, AC série P, vol. XCIX f. 153 (Alleaume).
[74] (1709) « Les jésuites furent cruellement trompés. Ils se croyoient bien assurés d’un prince élevé chez eux, qui leur avoient son fils unique dans leur collège, qui n’avoient qu’eux à Chantilly et toujours en compagnie, qui vivoient avec eux en entière familiarité. » Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint Simon sur le siècle de Louis XIV et la régence, A. Cheruel (éd.), Paris, Hachette, 1856-1858, tome IV, p. 348.
[75] Jeudi 25 janvier 1685, AC série P, vol. XCIX f. 182 (Alleaume).
[76] 27 janvier 1685, AC série P, vol. XCIX f. 194 (Xaintrailles).
[77] « M. de Meaux est venu et a assisté à une partie de l’étude qu’il a fait avec M. de la Bruyère». Mardi 20 février 1685, AC série P, vol. C, fol. 4.
[78] 9 février 1685, AC série P, vol. XCIX f. 315 (La Bruyère). « Vous devez du moins être très persuadé, Monseigneur, que le peu de temps que j’use auprès de M. le duc de Bourbon lui est fort utile, qu’il sait très bien ce que je lui ai appris, qu’il n’est pas aisé même de le mieux savoir, et que je viserai toujours à ce qu’il emporte de toutes mes études qu’il y a de moins épineux et ce qui convient davantage à un grand prince ».
[79] La Bruyère, Œuvres complètes, p. 656. 6 avril 1685, AC série P, vol. C, fol. 203 (Alleaume).
[80] AC p. vol. CII f. 195.
[81] Dangeau, Journal, tome 1, p. 194, le 29 août 1685. Gabriel, comte de Briord est un commensal du grand Condé depuis la Fronde et sera distingué par le roi comme diplomate dans les affaires de Hollande et d’Allemagne après 1697.
[82] Vendredi 12 octobre (28 octobre 1685), AC série P, vol. CIII f. 338 (Du Rosel).
[83] On ne peut juger de la réussite de cette formation car il meurt un an après avoir obtenu la survivance de la charge de son père. En revanche, cette charge fut mise en valeur et son rôle revendiqué par son fils, Louis IV de Bourbon-Condé, M le duc (1692-1740). Christophe Blanquie, "Dans la main du Grand maître", Histoire & Mesure, 1998, vol. 13, n° 3, pp. 243-288.
[84] 14 novembre 1683, AC série P, vol. XCIII f. 68-69. Etienne Allaire, La Bruyère dans l’hôtel de Condé : études biographiques et historiques sur la fin du XVIIe siècle, Paris, Firmin-Didot, 1886, tome I, p. 153.
[85] « Hier qui estoit un jour de fête, il rendit visite à Mademoiselle de la Fayette où il ne fut point embarrassé et parla assez, il arrivoit par malheur qu’on parla de M et de Mme de Richelieu qui lui parurent comme des gens dont il n’auroit jamais ouy parler n’y quelles charges ils avoient. Mlle de la Fayette ne lui laissa pas passer cet endroit et me dit bien qu’elle ne lui passeroit point s’il ne le savoit pas. Faute de lui avoir dit, je tachay à tourner sa charge en plaisanterie pour éviter l’explication, mais les moments de distractions sont à craindre pour Monseigneur le duc de Bourbon, et je ne serois pas défié s’il n’avoit point su une chose de cette nature que je luy ai tant de fois fait répéter et tant donné par écrit. Je souhaite que ce petit endroit lui ai fait assez de honte pour songer à en éviter de pareil». Le 17 janvier 1684 AC série P, vol. XCIV f. 227.
[86] Mercredi 2 août 1684, AC série P, vol. XCVI f. 111.
[87] Mardi 3 juillet 1685, AC série P, vol. C, fol. 379.
[88] Jeudi 5 juillet 1685 AC série P, vol. C, fol. 414.
[89] Mme de Sévigné, Correspondance, 22 juillet 1685, tome III, p. 100.
[90] Dangeau, Journal, tome 1, p. 181.
[91] Dangeau, Journal, tome 1, p. 196.
[92] 23 avril 1686, AC série P, vol. CVI f. 379. Louise Françoise de Bourbon (1673-1743), Mademoiselle de Nantes.
[93] Dangeau, Journal, tome II, p. 5.
[94] 27 avril 1686, AP p. vol. CVII f. 37.
[95] La Bruyère, Œuvres complètes, p. 670. 27 janvier 1686, AC série P, vol. CV f. 290.
[96] Ibid., p. 671, 26 mars 1686.
[97] 4 avril 1686, AP p. vol. CVI f. 206 (Briord).
[98] Mercure galant, p. 207 et suiv. En juillet 1685, mariage de Louis III de Bourbon Condé.
[99] Roger Chartier, "Redéfinition de l’histoire culturelle", ESC, nov.-dec. 1989, p. 1514.
[100] «Au fil du temps, l’identité change aussi. L’identité est toujours étroitement liée à des images forgées par les autres et à l’appropriation par le personnage de ces images selon son rôle, où se sont intégrées des conditions sociales et physiques de temps et d’espace » [p 222]. Willem Frijhoffs, "The Improbable Biography", in Volker R. Berghahn, Simone Lässig (éd.), Biography between structure and agency, New York, Oxford, 2008, p. 215-233.
[101] Charlotte Elisabeth de Bavière, duchesse d’Orléans, Lettres de Madame duchesse d’Orléans, née Princesse Palatine, Paris, Mercure de France, 1986, p. 200.