Le mouvement pétitionnaire pour la restauration d’Henri V (automne 1873-hiver 1874)
Éric Derennes
Derennes, Éric, « Le mouvement pétitionnaire pour la restauration d’Henri V (automne 1873-hiver 1874). Tactique politique et expression d’un légitimisme populaire », Revue historique, 2012/1 (n° 661), p. 49-99.
Extrait de l’article
Le mouvement pétitionnaire de 1873-1874 en faveur de la restauration de la monarchie traditionnelle s’inscrit dans un contexte général confus et incertain. Certes, en juillet 1873, le quart nord-est du territoire français était enfin libéré de l’occupation des armées allemandes et, en septembre, l’indemnité de guerre était soldée. Cependant, au traumatisme collectif et durable de la défaite militaire s’ajoutait celui de la Commune de Paris, l’ensemble impressionnant durablement les esprits. La paix revenue, le soulagement ressenti par l’opinion publique demeurait fragile. Il était fâcheusement contrebalancé par le caractère provisoire des institutions du pays qui inquiétait nombre de Français. La croissance ralentie de l’économie française depuis 1860 contribuait à l’entretien de la morosité ambiante en même temps qu’elle déclassait progressivement la France au sein du groupe des puissances industrielles. Si les effets de « la crise brutale qui touch[a] à partir du printemps 1873 l’Allemagne, puis l’Autriche et la Grande-Bretagne » n’affectèrent pas immédiatement l’ensemble de l’économie de la France, cette crise se révéla toutefois par des signes avant-coureurs de type sectoriel. Ainsi, les exportations françaises connurent « dès cette époque, une nette dégradation ». Nous verrons que l’atonie du commerce apparaît comme le premier et récurrent argument dans la rhétorique des pétitionnaires.