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L’impossible alliance : l’ambassade extraordinaire du cardinal D’Estrées à Venise (janv.-avr. 1701)

Benoît Maréchaux

Maréchaux, Benoît, « L’impossible alliance : l’ambassade extraordinaire du cardinal D’Estrées à Venise (janv.-avr. 1701) », Dix-septième siècle 2/2010 (n° 247), p. 291-312

Extrait de l’article

Bien qu’assurant une paix générale en Europe occidentale et orientale, les traités de Ryswick (1697) et de Karlowitz (1699) avaient été signés alors que tous les regards se tournaient déjà vers la succession d’Espagne, dont les enjeux étaient considérables. La paix à peine conclue annonçait déjà une nouvelle guerre, qu’elle permettait de préparer. Les cours les plus influentes s’affirmaient sur la scène européenne en multipliant les initiatives diplomatiques, les autres cherchaient à s’informer au mieux des rapports de force internationaux, afin d’agir en conséquence. Aux négociations de paix se substituaient celles pour la succession du royaume d’Espagne et son éventuel démantèlement. En mars 1700, la France signait ainsi avec l’Angleterre et la Hollande un traité de partage permettant un rapprochement diplomatique entre les trois puissances, tout en isolant l’empereur. En juillet, cet accord diplomatique était présenté au Collège de Venise par l’ambassadeur français. Face à la complexité de la conjoncture internationale, et du fait de sa propre indétermination sur le sujet, le gouvernement vénitien s’abstenait de tout engagement. Il en était de même quelques mois plus tard, lorsque Louis XIV annonçait par une lettre du 18 novembre son choix en faveur du testament de Charles II. La République félicitait certes le roi de France et son petit-fils monté sur le trône d’Espagne, mais ne répondait que par des propos bien généraux aux propositions françaises d’alliance diplomatique et militaire. L’indécision vénitienne était grande et ne faisait de mystère pour personne. La Sérénissime allait dès lors devenir l’objet de toutes les convoitises de la part des deux géants européens en quête d’un allié stratégique à l’aube d’un conflit imminent. C’est ainsi que Louis XIV décida de lui envoyer le cardinal D’Estrées comme ambassadeur extraordinaire. Il s’agit ici de retracer les négociations menées pendant plus de deux mois avec la République, et de comprendre la pratique diplomatique d’un envoyé français cherchant à obtenir l’alliance d’une puissance étrangère à la veille de la guerre de succession d’Espagne. Le cas vénitien était évidemment particulier et les négociations du cardinal D’Estrées permettront par conséquent d’esquisser certains traits significatifs des relations franco-vénitiennes à la fin de ce « Grand Siècle ». Le jeu de regards entre les deux puissances en constituera l’un des points d’approche principaux.

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