Horoscope de Philibert de l’Orme
Jean-Marie Pérouse de Montclos
Jean-Marie Pérouse de Montclos, "Horoscope de Philibert de l’Orme", dans Revue de l’Art, année 1986, volume 72, numéro 72, p. 16-18.
Extrait de l’article
II aura fallu attendre le retour de la comète de Halley pour apprendre des astres la date de naissance de Philibert de l’Orme. Et pourtant l’observation n’était pas de celles que l’on n’aurait pu faire que périodiquement : le ciel de Philibert est arrêté dans le Premier tome de l’architecture depuis 1567.
Le caractère autobiographique de ce traité a été maintes fois relevé. Le discours est conduit à la première personne du singulier ; il tend à faire l’apologie d’une œuvre et d’une carrière menacées par le terrible revers de fortune de 1559, que fut la mort accidentelle du roi Henri II. L’illustration de la théorie y est fournie par des remplois de l’œuvre bâtie ou projetée. L’auteur lui-même y est plusieurs fois représenté, mais par l’emblème et non par le portrait. Le portrait en buste de Philibert ne paraît en effet qu’avec les éditions posthumes. En revanche, on peut identifier l’auteur avec ce personnage en habit de clerc qui figure le bon architecte et l’architecte triomphant des difficultés sur deux planches, traitées à la manière d’Alciat, qui sont parmi les plus célèbres du Premier tome. Le texte que le deuxième emblème porte en exergue paraît inspiré par une expérience personnelle. « Artificem doctum discrimina mille morantur Dum celer ad palmam quaerit ab arte viam. » L’auteur traduit : « De mille peines et mille empeschements est retardé l’Artisant docte et sage quand par son art, sçavoir et instruments promptement quiert vers la palme passage. » L’architecte sort de la grotte de l’ignorance et va vers la palme du succès, en marchant sur un sol parsemé de chausse-trapes ; il tient en main le compas, attribut de sa profession, sur lequel s’enlasse le serpent de la prudence.