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De l’émergence de la pédiatrie dans les maisons des enfants royaux au XVIIIe siècle

Bernadette Molitor

Comment citer cette publication :
Bernadette Molitor, De l’émergence de la pédiatrie dans les maisons des enfants royaux au XVIIIe siècle, Paris, Cour de France.fr, 2015 (https://cour-de-france.fr/article3572.html). Article inédit publié sur Cour de France.fr le 28 février 2015.

Introduction [1]

Si le XVIIIe siècle n’est pas le siècle des grandes découvertes médicales - c’est au siècle suivant que la médecine moderne prendra toute sa place avec, entre autres, la découverte de la théorie cellulaire ou la médecine expérimentale - les avancées de la chimie, le déclin de la théorie des humeurs, le développement de l’anatomo-pathologie, de l’observation, la classification des maladies et la naissance de la médecine clinique en font un siècle charnière.

La médecine anatomo-clinique va lentement trouver sa place à côté de la médecine hippocratique comme en témoignent les auteurs suivants :

  • Hermann Boerhaave (1668-1738), qui à partir de 1714, à la suite de Sylvius, poursuivra à Leyden l’enseignement clinique au lit du malade ;
  • Jean-Louis Petit (1674-1750) qui écrira en 1723 dans son traité sur les os : « C’est par l’ouïe qu’on reconnait les fractures lorsqu’on entend le bruit que font les os, ce qui se nomme crépitation » ;
  • Jean-Baptiste Morgagni (1682-1771) de Bologne, fondateur de l’école anatomo-pathologique, qui fera le lien entre le symptôme et l’organe, lors de l’examen de plus de 600 malades gravement atteints ;
  • Joseph-Leopold Auenbrugger (1722-1809) de Vienne, inventeur de la percussion thoracique en 1760, qui sera le premier à proposer une technique d’examen clinique en recherchant un signe complétant la simple observation du malade.

Le XVIIIe siècle voit l’essor considérable de la chirurgie qui devient une véritable discipline scientifique, et la construction d’une clinique chirurgicale qui ouvre le chemin, entre 1720 et 1820, à la médecine clinique ; on constate la place de plus en plus importante tenue par les chirurgiens au sein du corps médical grâce à leur solide formation et à leur profonde connaissance dans le domaine de la pathologie et de l’anatomie (science fondamentale dans leur spécialité), ainsi qu’un climat favorable, avec la vogue du magnétisme animal de Mesmer, la découverte et l’application de l’électricité médicale. On assiste également à la création de l’Académie royale de chirurgie, de la Société royale de médecine, de l’Institut des jeunes aveugles (par Valentin Hauÿ) et de l’Institution des sourds-muets (par l’Abbé de l’Epée).

Parmi ces innovations, citons l’inoculation variolique, qui marque le début d’une prévention efficace contre cette terrible maladie (20 000 Parisiens meurent en 1719 d’une épidémie de petite vérole). En Europe, après l’inoculation du fils de Lady Montagu en 1718, cette nouveauté suscita beaucoup d’oppositions au nom du principe qu’il ne faut pas introduire un corps étranger malade dans un corps sain. Il faut attendre le milieu du siècle pour qu’elle soit acceptée notamment à la cour de France. En 1756, le médecin suisse Théodore Tronchin (1709-1781) inocula les enfants du duc d’Orléans. Turgot l’avait été un an auparavant. Ce n’est qu’après la mort de Louis XV, que Louis XVI accepta d’être inoculé lui aussi. L’opération eut lieu à Marly en juin 1774 où le roi, ses frères, la comtesse d’Artois et quelques habitants de la ville, furent inoculés par les médecins Richard et Jauberthou, inoculateurs bien connus à Paris. Cette méthode qui n’était pas sans danger, fut remplacée en 1796 par la vaccination découverte par Jenner, et pratiquée par Broussais pour la première fois à Paris en 1799.

De la médecine des enfants à la pédiatrie

Ce siècle voit apparaitre aussi une nouvelle approche des soins donnés aux enfants. La plupart des études à ce sujet s’accordent sur une situation sanitaire désastreuse concernant la petite enfance : les nouveau-nés de moins de 6 livres étaient abandonnés, « laissés à la grâce de Dieu », la mortalité infantile était effroyable : en effet, 40 % des enfants n’atteignaient pas l’âge de deux ans et 80 % des nourrissons accueillis à l’hospice des enfants trouvés mouraient avant l’âge d’un an.

La publication de nombreux traités sur les accouchements, rédigés en français, permit aux sages-femmes d’accéder à des connaissances théoriques et pratiques sur les soins à dispenser aux nouveau-nés. De nombreux médecins vont étudier à leur tour les maladies infantiles et les soins à leur donner. Parmi les traités publiés entre 1730 et 1786, retenons ceux qui ont marqué plus que d’autres le domaine, en commençant par le De morbis acutis infantum de Walter Harris à Londres en 1689 dont la traduction française parut en 1730 Traité des maladies aigues des enfans contenant de nombreuses observations [2]. Harris, médecin du roi d’Angleterre, eut une grande influence sur les médecins de son siècle.

En 1741, Nicolas Andry (1658-1742) publia L’orthopédie ou l’art de prévenir et de corriger les enfans, les difformités du corps [3]. Vice-président de la Société royale de médecine, Andry fut un des premiers orthopédistes à inventer de petits appareils et des techniques astucieuses de contention pour corriger ou prévenir les difformités du corps chez le jeune enfant.

L’éducation médicinale des enfants et de leurs maladies [4] de Pierre Brouzet, médecin ordinaire du roi et de l’Infirmerie royale de Versailles, parut en 1754 ; il s’agit d’un petit traité destiné aux personnes chargées de donner des soins aux jeunes enfants qui démontre l’importance d’une bonne éducation médicale. Éducation qui ne doit pas être confondue avec l’éducation morale, précise l’auteur, qui insiste aussi sur le rôle des médecins trop peu attentifs à la santé du jeune enfant, et qui oublient que le choix des soins à appliquer doit tenir compte des spécificités du jeune âge des enfants, particulièrement en ce qui concerne l’état des organes du nouveau-né, son sommeil, sa nourriture.

Antoine Jean-Baptiste Guenet, docteur-régent de la Faculté de médecine de Paris, membre de la Société royale de médecine, publia en 1777 une Instruction abrégée sur les maladies des enfans [5], petit traité sur les maladies infantiles courantes avec une liste de remèdes destinés à être distribués dans les villages aux nourrices allaitant, ainsi qu’un commentaire sur l’emploi et l’usage de remèdes efficaces.

Jean Astruc (1684-1766) de Montpellier écrivit en 1747 un traité sur les maladies de la peau, des dents et des maladies du bas-ventre des enfants [6], dont l’enseignement se démarque par un grand sens pédagogique. Il fut également professeur à la Faculté de médecine de Paris, médecin consultant du roi. Intéressé par tous les domaines de la médecine, il était d’une grande culture et considéré comme l’un des plus brillants enseignants du siècle. Sa bibliothèque ne comprenait pas moins de 3500 volumes. Malheureusement, et contrairement à Joseph Lieutaud (1703-1780), médecin des enfants de France, il ne vit pas l’importance de l’observation, resta opposé aux chirurgiens et fut un farouche adversaire de l’inoculation.

Jacques Ballexserd (1726-1774) de Genève publia en 1762 une Dissertation sur l’éducation physique des enfans depuis leur naissance jusqu’à l’âge de la puberté [7], ouvrage dédié à Antoine Petit, docteur-régent de la Faculté de médecine de Paris. Comme Joseph Raulin, il démontre que l’éducation physique et une bonne hygiène de vie améliorent la santé des petits enfants et augmentent leur résistance et leurs chances de survie.

Le conseiller, médecin ordinaire du roi et censeur royal Joseph Raulin (1708-1784) publia en 1768 un ouvrage intitulé De la conservation des enfans ou les moyens de les fortifier [8]. Dans la préface dédiée au roi, il note la tendresse paternelle du souverain pour les enfants naissants et précise qu’il a entrepris l’ouvrage « par ses ordres… afin qu’on y trouve les moyens les plus propres pour favoriser la population ». Cet ouvrage était destiné aux sages-femmes. Raulin fut également membre de la Société royale de Londres.

En 1769 parut la traduction française des Aphorismes [9] de Hermann Boerhaave (1668-1738), premier médecin de l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche, sous le titre Traité des maladies des enfans [10] à Avignon par le Dr François Paul.

Nils Rosen de Rosenstein (1706-1773), dénommé le père de la pédiatrie suédoise, a préparé le terrain de la pédiatrie moderne. Après avoir étudié la médecine en France, à Montpellier et à Paris, il fut nommé médecin de la famille royale de Suède. Il publia en 1764 le premier traité de pédiatrie d’Europe : Underrättelser om Barn-Sjukdomar och deras Bote-Model [11] À partir de nombreuses observations, il décrit les maladies les plus courantes, leurs causes, les symptômes et la thérapeutique à appliquer, avec une adaptation spécifique de la matière médicale et de la pharmacopée aux maladies infantiles. L’auteur insiste particulièrement sur l’inoculation de la variole et de la rougeole et leur rôle de prévention. Les passions de l’âme, sujet assez rarement abordé pour l’enfant, font l’objet d’un autre chapitre. Un index final très détaillé complète cet ouvrage, qui sera traduit dans plusieurs langues et fera l’objet de nombreuses rééditions. La traduction française date de 1778.

Enfin en 1786 parut la traduction française du traité A treatise on the diseases of children [12], écrit en 1784 par Michael Underwood (1737-1820). Dans l’édition anglaise suivante, publiée en 1789 [13], ce médecin est le premier à décrire la poliomyélite. Son livre sera réédité tout au long du XIXe siècle.

Soulignons au terme de ce rapide panorama que les auteurs abordent l’ensemble des maladies infantiles, du rhume de cerveau jusqu’aux convulsions, mais aussi des pathologies comme la méningite tuberculeuse ou l’appendicite (peu connue à l’époque, décrite par Lieutaud). Ils ont recherché les mesures de prévention et les traitements les plus efficaces.

En un demi-siècle, la médecine des enfants commence à trouver sa place au sein des sciences médicales, comme en témoigne la présence des ouvrages de Andry, Brouzet, Harris, Lieutaud, Raulin, Rosenstein et Underwood dans les catalogues de bibliothèques de médecins ou de chirurgiens contemporains.

La médecine des enfants a fait ainsi son entrée au sein de la maison médicale des enfants de France et plusieurs des auteurs cités, comme Andry, Astruc, Brouzet, Raulin, Guenet, Lieutaud, ont occupé une charge auprès du souverain, ont été membres de la Société royale de médecine et ont bénéficié ainsi d’une position privilégiée à la Cour.

Médecins et chirurgiens à la Cour. La maison médicale des enfants de France

Un médecin historien de la médecine du XIXe siècle, Achille Chéreau, écrivait à propos des médecins du roi : « le Roi choisissait ses médecins parmi ceux qui avaient une grande souplesse dans les articulations vertébrales, une passion malheureuse pour le despotisme, une dose énorme de patience, une courtisanerie déliée…il fallait avoir un masque, sourire à ses ennemis... [14]». Ce poste demandait une présence constante auprès du souverain.
Si les médecins ont pu gravir l’échelle sociale dans la société civile, c’est grâce au progrès des sciences en général et de la médecine en particulier. Au cours de la deuxième moitié du siècle, le succès de l’inoculation, la vogue de l’électricité médicale et du magnétisme animal leur apportèrent une reconnaissance sociale. Certains surent manœuvrer pour obtenir les faveurs d’une partie de l’aristocratie et d’une bourgeoisie qui gagnait en influence, en fréquentant les salons et les cercles des encyclopédistes. Si les querelles entre les corps médicaux étaient moins virulentes à la cour qu’à la ville, la Faculté étant moins influente, les rivalités demeuraient. À la cour, c’était l’autorité royale qui tranchait entre les différentes factions et décidait de l’emploi des chirurgiens. Même si certains membres de ce corps, dont ceux que nous avons évoqués, s’avéraient de brillants scientifiques et auteurs, ils se heurtaient à l’opposition de la Faculté de médecine de Paris, et les conflits entre médecins et chirurgiens, vieux de plus de deux siècles, perduraient. Cependant, grâce au savoir-faire de premiers chirurgiens du Roi tels que G. Mareschal, F. Gigot de la Peyronie ou La Martinière, hommes de grande influence au sein de la maison du souverain, d’importantes réformes en faveur de la chirurgie virent le jour : à partir de 1730, la Faculté de médecine ne put plus exercer la censure sur les ouvrages publiés par les chirurgiens, le contrôle en étant dorénavant confié au Collège de chirurgie ; par décision du Conseil d’État en 1750, les chirurgiens furent diplômés de l’université au même titre que les médecins et à compter de 1770, le premier chirurgien du roi qui était jusqu’alors sous les ordres du premier médecin, devint son égal.

C’est aussi grâce aux soins dispensés aux souverains (la fistule de Louis XIV en 1686, par exemple) et aux autres membres de la famille royale que les chirurgiens purent bénéficier d’une protection royale accrue. Ainsi Louis XIV leur donna l’occasion d’enseigner et de démontrer l’anatomie au Jardin du roi. L’intérêt constant porté par les souverains aux sciences en général et à la médecine en particulier, favorisa la naissance de deux sociétés savantes déterminantes pour l’avancée de la médecine, rassemblant l’élite médicale du temps et conseillant les souverains pour les mesure à prendre en cas d’épidémie, par exemple. En 1748 fut créée l’Académie royale de chirurgie (anciennement Société de Chirurgie ou Société académique de chirurgie). Le premier président fut le premier chirurgien du roi Germain Pichault de la Martinière, et le secrétaire Antoine Louis. D’importants Mémoires furent publiés entre 1743 et 1774 [15]. La Société Royale de médecine, autre grande société médicale influente, fut créée en 1776 avec le soutien du roi et grâce à la perspicacité de deux médecins de la Cour : Félix Vicq d’Azyr, qui en était le secrétaire, et Lassone, président entre 1776 et 1784. Cette société savante prenait la suite de la Commission pour les épidémies et était l’aboutissement du projet de Pierre Chirac, premier médecin du roi, qui avait voulu créer une Académie royale de médecine. Placée sous l’autorité du premier médecin du roi, elle échappait ainsi à l’emprise de la Faculté de médecine de Paris. Elle publia également des Mémoires [16] entre 1776 et 1789, dont plusieurs rapports sur les maladies infantiles.

Si les heureux « élus » choisis par le souverain devaient principalement leur place à leur réputation professionnelle, leurs relations au sein de la cour les favorisaient et leur permettaient d’obtenir de nombreux privilèges. Au cours du siècle, la « maison médicale du roi » [17], composée d’un premier médecin-conseiller d’État, surintendant des Eaux minérales, d’un premier chirurgien, d’un premier médecin, d’un premier chirurgien ordinaire, de médecins ou de chirurgiens servant par quartiers, de médecins ordinaires, d’apothicaires, de dentistes et d’oculistes, prit de plus en plus d’importance ; on recense plus de 90 praticiens en 1776, certains pouvant être au service de plusieurs membres de la famille.

Le corps des médecins et chirurgiens rattachés à la maison des enfants de France s’accrut lentement tout au long du siècle. Composée d’un médecin du roi chargé de veiller sur la santé des petits princes, elle se structura vers 1727 autour d’un médecin et d’un chirurgien qui étaient spécialement attachés à la personne des enfants royaux. Ils étaient en principe choisis par le premier médecin du souverain (seul praticien dont la charge ne soit pas vénale) avec l’accord du roi. Prêtant serment devant le souverain et le premier médecin, ils étaient tenus de demeurer pendant la période de leur service auprès des enfants et avaient la qualité de médecin ou chirurgien ordinaire ; ils étaient placés sous l’autorité du premier médecin du roi.

Les médecins et chirurgiens de la cour appartenaient presque toujours aux facultés de médecine de Montpellier ou de Paris et pouvaient être assistés ponctuellement par des « spécialistes » (dentistes, oculistes, apothicaires) externes à la Maison du roi, membres de la Faculté de médecine de Paris ou du Collège de chirurgie. On les désignait comme médecins ou chirurgiens consultants du roi (François Pousse ou Michel Vernage en 1752 pour des soins donnés au dauphin). Les spécialistes étaient appelés à la cour sur ordre du premier médecin ou du souverain lui-même pour les cas graves (la maladie du duc d’Anjou en 1733, la tuberculose du dauphin en 1760). Ils pouvaient également être attachés à un autre membre de la famille royale. Les apothicaires du roi étaient également au service des enfants de France.

Si pour un premier médecin du roi, le revenu annuel pouvait se situer entre 40 000 et 60 000 livres, celui du médecin des enfants de France s’élevait à 15 000 livres et celui du chirurgien à 13 000 livres [18].

Conclusion

S’il faut attendre le début du XXe siècle pour que la pédiatrie soit reconnue comme une discipline à part entière (le terme n’apparaît en effet dans les dictionnaires et les encyclopédies qu’à partir de 1872), on peut dire que cette spécialité naît véritablement au cours du XVIIIe siècle grâce à l’extraordinaire émulation en Europe de médecins soucieux de la santé et du bien-être des enfants. Les médecins des enfants de France avaient l’obligation de les soigner, de veiller sur leur santé et d’essayer de préserver particulièrement celle du dauphin. À défaut d’être toujours efficaces, ces praticiens ont exercé leur art avec zèle et dévouement auprès de leurs petits patients, leur dispensant des soins attentifs, souvent pendant de longues années : Bouilhac de Montpellier fut au service des enfants de France plus de vingt ans, Lieutaud le fut pendant vingt-deux ans, Loustonneau, père et fils, pendant trente ans.

La reconnaissance royale permit à ces praticiens d’obtenir de nombreux privilèges et d’accéder à de hautes positions au sein de la cour, de se constituer d’importants patrimoines immobiliers et financiers et de contracter des alliances matrimoniales avantageuses. Leurs « héritiers », Baudelocque, Larrey, Corvisart, Dupuytren, Alibert seront des conseillers écoutés des souverains du XIXe siècle, grand siècle de la médecine française, qui verra se mettre en place une véritable élite médicale.

Annexes

1. Tableau chronologique

Nous donnons ci-dessous un tableau chronologique récapitulant le rôle des principaux médecins et chirurgiens des Enfants de France ainsi que leurs titres, et prions le lecteur de bien vouloir se reporter aux notices plus détaillées du Dictionnaire du monde médical en ligne sur Cour de France.

Noms des praticiensFonctionsOffices, dignités
Antoine Poirier (? - 1718 Paris) Après avoir soigné le frère aîné de Louis XV, il est nommé médecin du jeune roi de 1715 à 1718.
Jean Boudin(1660-1728) Médecin ordinaire de Louis XV enfant. Doyen de la Faculté de médecine de Paris.
Claude Dodart (1664-1730) Il succède à Poirier comme médecin du jeune Louis XV à partir de 1718. Anobli en 1720.
François Chicoyneaude Montpellier (1672-1752) Médecin de Louis XV enfant puis de ses enfants. Il succède à son confrère Burlet, mort en 1731.
Jean-Baptiste Bouilhac ou Bouillac de Montpellier (1689-1769) Assistant de Chicoyneau désigné par le Roi, médecin des enfants de France à partir de 1732 (il le reste durant 20 ans malgré l’opposition de certains membres de la cour et de la famille royale), puis premier médecin du dauphin en 1735.
Joseph Lieutaud de Montpellier (1703-1780) Médecin des enfants de France (1756-57), puis premier médecin de Louis XVI (1774-1780). Doyen de la Faculté de médecine de Paris.Premier président de la Société royale de médecine.
Joseph Lassone (1717-1788) Médecin des filles de Louis XV, premier médecin de Louis XVI. Il obtient l’accord du roi pour inoculer la famille royale en 1774. Président de la Société royale de médecine (1776-1784).
Guillaume Lemonnier (1717-1799) Assiste à l’autopsie de la fille de Louis XVI, Marie-Sophie, en 1787.Médecin ordinaire de Louis XV, premier médecin de Louis XVI. Président de la Société royale de médecine.
Antoine Petit (1722-1794) Auteur de l’Avis sur l’état de santé du dauphin, le duc de Bourgogne, paru en 1760.Présent en novembre 1785 lors de l’inoculation du dauphin, puis en 1788 pour celle du duc de Normandie.
Jean-Louis Jauberthou (1728-1797) Médecin consultant du comte d’Artois.Il inocule Louis XVI et des membres de la famille royale en 1774, puis Madame Royale, le Dauphin et le duc de Normandie. Anobli en 1784.
Pierre-Edouard Brunyer (1729-1811), originaire de Montpellier Médecin des enfants de France, puis de Louis XVI. Membre associé de la Société royale de médecine.
Gilles de Bertrand de Pibrac de Montpellier (1693-1771) Appelé au chevet du duc de Bourgogne en 1760. Anobli en 1752.Conseiller de l’Académie royale de chirurgie.
Jean-Baptiste Andouillé (1718- ?) Chirurgien du roi et des enfants de France. Anobli en 1766.Président de l’Académie royale de chirurgie.
Jean Loustonneau ( ?-1782)- Chirurgien des enfants de France entre 1752 et 1780, en remplacement de Pierre Lambert.

2. Quelques exemples de pathologies des enfants de France

Le tableau ci-dessous montre qu’en dépit de leurs conditions de vie privilégiées les enfants de France n’étaient pas épargnés par les pathologies et les maladies courantes sous l’ancien régime (rhumes, maladies infantiles, fluxions dentaires, angine, tuberculose).

Nom et titreFiliationPathologies et maladiesMédecins (m) et chirurgiens (c )
LOUIS, duc de Bretagne, frère aîné de Louis XV (1707-1712). Fils de Louis de France, duc de Bourgogne et de Marie-Adélaïde de Savoie. Meurt de la rougeole en 1712. Poirier (m), Boudin (m), Dodart (m), La Peyronie (c), Mareschal (c)
LOUIS XV, roi (1710-1774). Fils de Louis de France et de Marie-Adélaïde de Savoie. Fortes fièvres en 1721. Dodart lui dispense des soins avec dévouement et efficacité. Dodart (m)
LOUIS FERDINAND dauphin (1729-1765) Fils de Louis XV et de Marie Leszczyńska. A la rougeole en 1734, souffre en 1738 d’un abcès à la mâchoire soigné par Bouilhac assisté des médecins Silva et Dumoulin de la Faculté de médecine de Paris. Meurt d’une affection pulmonaire. Chicoyneau (m), Bouilhac (m), Silva (m), Dumoulin (m), La Peyronie (c)
MARIE LOUISE Madame Troisième (1728-1733) Fille de Louis XV et de Marie Leszczyńska. Meurt d’un « gros rhume » en février 1733, malgré les soins de Bouilhac. Chicoyneau (m), Bouilhac (m), La Peyronie (c)
PHILIPPE duc d’Anjou (1730-1733) Fils de Louis XV et de Marie Leszczyńska. Meurt de fortes convulsions. L’autopsie ne permet pas de déterminer la cause du décès du prince. Chicoyneau (m), Bouilhac (m), La Peyronie (c)
THERESE FELICITE, Madame Sixième (1736-1744) Fille de Louis XV et de Marie Leszczyńska Meurt de la variole en l’abbaye de Fontevrault à l’âge de huit ans. Chicoyneau(m), Bouilhac (m), La Peyronie (c)
LOUISE MARIE, Madame Dernière (Madame Septième) (1737-1787) Fille de Louis XV et de Marie Leszczyńska Atteinte de scoliose et d’une déformation du rachis. Chicoyneau(m), Bouilhac (m), Silva (m), Dumoulin (m), La Peyronie (c)
MARIE-ZEPHIRINE (1750-1755) Fille de Louis Ferdinand de France et de Marie-Josèphe de Saxe. Meurt de convulsions à l’âge de 5 ans. Bouilhac (m), Lieutaud (m), Lorry (m), Andouillé (c), Pibrac (c), Petit(c)
LOUIS JOSEPH XAVIER, duc de Bourgogne (1751-1761) Fils de Louis Ferdinand de France et de Marie-Josèphe de Saxe. Atteint de petite vérole en 1752, soigné par Lieutaud. En 1760, tumeur au fémur à la suite d’une chute ; Pibrac est appelé au chevet du prince qui est opéré par Andouillé après consultation de la Faculté. Meurt le 22 mars 1761 de tuberculose osseuse. Bouilhac (m), Lieutaud (m), Lorry (m), Andouillé (c), Pibrac (c), Petit (c)Bouvard (m), Bordeu (m), Faget (m), Morand (m)
MARIE-THERESE Madame Royale (1778-1830) Fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Inoculée en 1782. Lassone, Andouillé, Brunyer, Blanquié et Loustonneau constatent son bon état de santé à la suite de cette inoculation. Brunyer (m), Lassone (m), Loustonneau (c)
MARIE-SOPHIE (1786-1787) Fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Meurt de convulsions consécutives à des poussées dentaires.Lors de l’autopsie, les médecins constatent le très mauvais état général de ses organes. Lemonnier (m), Lassone (m), Andouillé (c), Loustonneau (c)
LOUIS JOSEPH XAVIER (1781-1789), dauphin Fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Fortes fièvres en 1784. En 1785, inoculation à St Cloud par Jauberthou. Le Prince atteint d’une scoliose devait porter des corsets de contention. Lors de l’hiver 1788 fortes fièvres. Le chirurgien Antoine Petit diagnostique une carie vertébrale et craint une tuberculose qui aurait été transmise par la nourrice du prince. Après des mois de souffrances et malgré les soins dispensés, l’enfant meurt le 4 juin 1789. Lemonnier (m), Lassone (m), Brunyer (m), Andouillé (c), Loustonneau (c), Petit (c), Jauberthou (m)
LOUIS CHARLES (1785-1795), duc de Normandie [Louis XVII] Fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Inoculé en 1788 à St Cloud. Meurt officiellement de tuberculose en juin 1795. Brunyer (m), Jauberthou (m), Petit (c), Desault (m)

Bibliographie

AN : Archives nationales.
BAM : Bibliothèque Académie de médecine.
BHVP : Bibliothèque historique de la ville de Paris.
BIUSanté : Bibliothèque interuniversitaire de santé de Paris

Sources

Nicolas Andry, L’orthopédie ou l’art de prévenir et de corriger les enfans, les difformités du corps, Paris, Vve Alix, 1741 (disponible en ligne).
Archives nationales, Maison des Enfants de France AN, série O1/3715-3798-3799.
Jean Astruc, Traité des maladies des enfants, 1747, BAM, cote Ms 568.
Jacques Ballexserd, Dissertation sur l’éducation physique des enfans depuis leur naissance jusqu’à l’âge de la puberté, Paris, Vallat-La-Chapelle, 1762 (disponible en ligne).
Hermann Boerhaave, Traité des maladies des enfans - traduit du Latin des aphorismes de Boerhaave commentés par M. le Baron de Van-Swieten,... ; Par M. Paul, médecin. Avignon et Paris, Saillant et Nyon, 1769 (disponible en ligne).
Pierre Brouzet, L’éducation médicinale des enfants et leurs maladies, Paris, Vve Cavelier et fils, 1754 (disponible en ligne).
BIUSanté. Inventaires et catalogues des bibliothèques ayant appartenues à des médecins :

  • Jean Astruc, Paris, Cavelier, 1766, BIUSanté, cote 40104.
  • Claude Jean-Baptiste Dodart, Paris, G. Martin, 1731, BIUSanté, cote 40186-1.
  • François Gigot de la Peyronie, s.l. 1751, BIUSanté, cote Ms 2010,
  • Sauveur-François Morand, Paris, Prault, 1774, BIUSanté, cote 40185,
  • Germain Pichault de la Martinière, Paris, s.n., 1784,BIUSanté, cote 90958 t. 239 n°5 bis.

Achille Chéreau, Médecins et chirurgiens des rois de France,BHVP, cote Ms CP4983.
Antoine Jean-Baptiste Guénet, Instruction abrégée sur les maladies des enfans, Paris, Impr. de Ph. D. Pierres, 1777 (disponible en ligne).
Walter Harris, De Morbis Acutis Infantum, London, Samuel Smith, 1689. Traité des maladies des enfans contenant de nombreuses observations, Paris, J. Clouzier, 1730 (disponible en ligne).
Histoire de la Société royale de médecine...avec les mémoires...tirés des registres de cette société, Paris, de l’imprimerie de P. D. Pierre, (..) chez Th. Barois le jeune...,1776-1789, 10 tomes (disponible en ligne).
Antoine Louis, Éloges lus dans les séances... de l’Académie royale de chirurgie de 1750 à 1792, Paris, J.-B. Baillière, 1859, p. 179-88.
Laborde, Alexandre Léon de, Fichier concernant les médecins, chirurgiens et barbiers exerçant en France aux XVIe et XVIIe, XVIIIe siècles, BIUSanté, cote Ms 1857.
Mémoires de l’Académie royale de chirurgie, Paris, Delaguette, 1743-1774, 5 tomes (disponible en ligne)
Joseph Raulin, De la conservation des enfans ou les moyens de les fortifier, Paris, Merlin, 1768 (disponible en ligne).
Nils Rosen de Rosenstein, Traité des maladies des enfans, ouvrage qui est le fruit d’une longue observation, & appuyé sur les faits les plus authentiques. Traduit du suédois..., Paris, Pierre-Guillaume Cavelier, 1778 (disponible en ligne).
Michael Underwood, Traité des maladies des enfans, Paris, Théophile Barois le jeune, 1786 (disponible en ligne).
Michael Underwood, A treatise of the diseases of children, London, J. Mathews, 1789.

Études modernes

Astruc, Jean, Traité des maladies des enfants, fac-similé d’un manuscrit original inédit de 1747, Genève, Slatkine, 1980.
Becquet, Hélène, « La cour de France sous Louis XVI, un système en décadence », Dix-huitième siècle, 2006, 1, n° 38, p. 407-426.
Biraben, Jean-Noël, « Aperçu sur la pédiatrie au XVIIIe s », Annales de démographie historique, 1973, p. 215-223.
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Notes

[1Je remercie Jacqueline Vons pour la relecture de cet article et ses conseils judicieux.

[2Walter Harris, De Morbis Acutis Infantum, London, Samuel Smith, 1689 ; Traité des maladies des enfans contenant de nombreuses observations, Paris, J. Clouzier, 1730.

[3Nicolas Andry, L’orthopédie ou l’art de prévenir et de corriger les enfans, les difformités du corps, Paris, Vve Alix, 1741.

[4Pierre Brouzet, L’éducation médicinale des enfants et leurs maladies, Paris, Vve Cavelier et fils, 1754.

[5Antoine Jean-Baptiste Guénet, Instruction abrégée sur les maladies des enfans,Paris, Impr. de Ph. D. Pierres, 1777.

[6Jean Astruc, Traité des maladies des enfants, 1747, manuscrit (BAM).

[7Jacques Ballexserd, Dissertation sur l’éducation physique des enfans depuis leur naissance jusqu’à l’âge de la puberté, Paris, Vallat-La-Chapelle, 1762.

[8Joseph Raulin, De la conservation des enfans ou les moyens de les fortifier, Paris, Merlin, 1768.

[9Hermann Boerhaave, Traité des maladies des enfans — traduit du Latin des Aphorismes de Boerhaave commentés par M. le Baron de Van-Swieten,.... Par M. Paul, médecin, Avignon et Paris, Saillant et Nyon, 1769.

[10Ibid.

[11Nils Rosen von Rosenstein, Traité des maladies des enfans, ouvrage qui est le fruit d’une longue observation, appuyé sur les faits les plus authentiques. Traduit du suédois, Paris, Pierre-Guillaume Cavelier, 1778.

[12Michael Underwood, Traité des maladies des enfans, Paris, Théophile Barois le jeune, 1786.

[13Michael Underwood, A treatise of the diseases of children, London, J. Mathews, 1789.

[14Achille Chéreau, « Les trois premiers médecins de Louis XVI » dans Union médicale, 1866, n°3, p. 33-34.

[15Mémoires de l’Académie royale de chirurgie, Paris, Delaguette, 1743-1774, 5 tomes.

[16Histoire de la Société royale de médecine...avec les mémoires... tirés des registres de cette société, Paris, chez Th. Barois le jeune, 1776-1789, 10 tomes.

[17Expression utilisée dans le Bulletin général de thérapeutique médicale et chirurgicale, 1831, 2, p. 400, que nous reprennons

[18Maison des Enfants de France, gages, traitements, 1782-1792, AN, O1/3799-2.