La lecture des débats en moyen français : approches d’un jeu courtois
Hélène Haug
Haug, Hélène. « La lecture des débats en moyen français : approches d’un jeu courtois », Le Moyen Age, vol. cxxii, no. 2, 2016, p. 275-302.
Extrait de l’article
Le peu de travaux critiques qu’a suscité la forme du débat médiéval en fait un genre textuel encore relativement indéfini au sein des productions littéraires en moyen français. Cette forme littéraire a donné lieu à une littérature abondante de jugements, procès, batailles, débats, disputaisons. Les tentatives visant à définir le genre ont montré que celui-ci se laisse difficilement délimiter : il représenterait plus une configuration d’œuvres qu’un genre littéraire spécifique. Cette indétermination du genre a certainement joué un rôle dans la difficulté qu’a eu la critique à aborder ces œuvres, et n’est pas indifférente à l’oubli relatif dans lequel elles sont longtemps restées. La variabilité des titres et des formes ne semble cependant pas avoir constitué un frein pour les auteurs médiévaux, qui intitulent leurs œuvres « débats », « dialogues » et « jugements » mais adoptent des structures thématiques et des topoi récurrents d’un texte à l’autre.
Ce que je nommerai dans cet article le « genre » des débats comprend un ensemble de dialogues littéraires, rédigés habituellement en vers, où deux personnages ou plus échangent leurs points de vue sur un problème ou une question. Ce phénomène littéraire est commun aux littératures médiévales européennes, où il semble apparaitre durant un laps de temps assez restreint (XIIIe–XVIe siècles). S’il a été investigué dans ses manifestations anglophone et hispanophone, le phénomène des débats, pour le moyen français, a fait l’objet d’une seule étude d’ensemble, réalisée par P.Y. Badel en 1988. Cependant, le sujet acquiert ces dernières années un regain d’intérêt, comme en témoignent plusieurs recherches récentes, pour certaines encore inédites.